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ORDONNANCE SUR LES DISPOSITIFS MÉDICAUX
LOI SUR LE BLANCHIMENT D’ARGENT
LOI SUR LA TRANSPARENCE
LOI FÉDÉRALE SUR LE TRANSFERT INTERNATIONAL DES BIENS CULTURELS
- I. Généralités
- II. Les conditions pour l'inscription à l'inventaire
- III. La procédure d'inscription à l'inventaire
- IV. Les effets de l'inscription à l'inventaire
- V. La procédure de radiation de l'inventaire
- VI. La forme de l'inventaire et la compétence pour sa tenueE
- VII. Les autres inventaires de la LTBC
- VIII. Les autres inventaires fédéraux relatifs à la protection du patrimoine culturel
- Bibliographie
I. Généralités
1 Les articles 5 let. b et 13 let. d de la Convention concernant les mesures à prendre pour interdire et empêcher l’importation, l’exportation et le transfert de propriété illicites des biens culturels du 17 novembre 1970 (RS 0.444.1; ci-après : Convention UNESCO de 1970), dont la Suisse est un État partie depuis 2003, servent de fondement à l’art. 3 de la Loi fédérale sur le transfert international des biens culturels du 20 juin 2003 (RS 444.1 ; ci-après : LTBC). De cette manière, la Suisse concrétise ainsi certains de ses engagements pris lors de la ratification de ladite convention qui fixe des exigences minimales en matière de protection des biens culturels en temps de paix.
2 L’art. 5 de la Convention UNESCO de 1970 prévoit que les États parties s’engagent à créer un ou plusieurs service(s) de protection du patrimoine culturel chargé(s) d’assurer diverses tâches dont l’établissement et la mise à jour d’un inventaire national de protection contenant la liste des biens culturels importants, publics et privés, dont l’exportation constituerait un appauvrissement sensible du patrimoine culturel national de l’État (let. b). L’étendue du champ d’application matériel de cet inventaire se limite alors aux biens qui font partie du patrimoine culturel tel que défini par l’art. 4 de la Convention UNESCO de 1970
Lors de la procédure de consultation relative au projet de convention, le Danemark et les États-Unis ont exprimé leurs doutes quant à la faisabilité d’un tel inventaire, en arguant qu’il s’agirait d’une énorme entreprise qui pourrait aller au-delà des ressources de certains États
L’art. 5 let. b de la Convention UNESCO de 1970 mentionne que les inventaires nationaux doivent être tenus à jour. Par conséquent, les biens archéologiques nouvellement découverts, les œuvres nouvellement crées ainsi que les biens restitués doivent y figurer, pour autant qu’ils soient d’une certaine importance pour le patrimoine culturel de l’État partie
3 L’art. 13 let. d de la Convention UNESCO de 1970 prévoit que les États parties s’engagent à reconnaitre le droit imprescriptible, c’est-à-dire permanent et irrévocable, de chacun d’entre eux à classer et déclarer inaliénables certains biens culturels qui, dès lors, ne doivent pas être exportés. Ils se doivent également de faciliter l’aboutissement des demandes en restitution en cas d’exportation illicite de ces biens dits inaliénables.
Le concept d’inaliénabilité, prérogative de l’État, est lourd de conséquences puisqu’il signifie que la propriété du bien ne peut être légalement transférée, que ce soit par le biais d’une vente, d’une donation ou de quelque autre mode de disposer. Il est essentiellement utilisé par les pays de droit civil, en particulier la France. C’est d’ailleurs sur le modèle français que l’UNESCO s’est basée pour adopter cette disposition
4 Ces deux dispositions prévoient des engagements qualifiés d’obligations d’ordre général en ce sens qu’ils sont pris par chacun des États parties dans « les conditions appropriées à chaque pays » (pour l’art. 5 de la Convention UNESCO de 1970) et dans « le cadre de la législation de chaque État » (pour l’art. 13 de la Convention UNESCO de 1970)
II. Les conditions pour l'inscription à l'inventaire
5 L’art. 3 al. 1 LTBC prévoit la tenue d’un inventaire fédéral
être qualifié de bien culturel au sens de la LTBC ;
être la propriété de la Confédération ;
revêtir une importance significative pour le patrimoine culturel.
A. Être qualifié de bien culturel au sens de la LTBC
6 En vertu de l’art. 2 al. 1 LTBC, sont qualifiés de biens culturels « les biens qui [...] revêtent de l’importance pour l’archéologie, la préhistoire, l’histoire, la littérature, l’art ou la science et qui font partie de l’une des catégories prévues à l’art. 1 de la convention de l’UNESCO de 1970 ou à l’art. 1 al. 1 let. a de la convention de l’UNESCO de 2001 »
La première condition cumulative de l’art. 2 al. 1 LTBC est relative à l’importance du bien pour les différents domaines que sont, alternativement, l’archéologie, la préhistoire, l’histoire, la littérature, l’art ou la science. La seconde fait référence à l’appartenance du bien à l’une des catégories prévues dans la Convention UNESCO de 1970 ou dans la Convention sur la protection du patrimoine culturel subaquatique du 2 novembre 2001 (RS 0.444.2). Tout bien qui remplit cumulativement les deux conditions susmentionnées est qualifié de bien culturel au sens de la loi et est susceptible d’être inscrit à l’inventaire fédéral (pour autant qu’il réalise les deux autres conditions cumulatives de l’art. 3 al. 1 LTBC, ci-après développées).
7 Il existe ainsi deux catégories de biens culturels au sens de la LTBC : les biens culturels de l’art. 2 al. 1 LTBC qui sont également appelés « biens culturels simples » et les biens culturels de l’art. 3 al. 1 LTBC qui sont inscrits à l’inventaire fédéral et qui sont nommés « biens culturels au sens strict »
B. Être la propriété de la Confédération
8 Afin qu’il soit possible d’inscrire un bien culturel à l’inventaire fédéral, la Confédération, et elle seule, doit en être propriétaire. Un particulier ne peut donc pas requérir l’inscription de l’un de ses biens à l’inventaire quand bien même celui-ci remplirait les autres conditions nécessaires à son inscription. En principe, la Confédération devient propriétaire d’un bien, à titre de particulier, par le biais d’un transfert de propriété s’opérant de manière légale (achat, don, legs, etc.). A contrario, elle ne devient pas propriétaire de par la loi, comme c’est le cas des curiosités naturelles et antiquités trouvées qui appartiennent ipso jure au canton sur le territoire duquel elles ont été découvertes (art. 724 al. 1 CC). Par ailleurs, contrairement à d’autres États, la Confédération n’a pas le droit de « s’approprier des biens culturels en mains privées qu’elle estime être d’importance nationale »
Selon l’art. 641 al. 1 du Code civil suisse du 10 décembre 1907 (RS 210 ; ci-après : CC), le propriétaire d’une chose a le droit d’en disposer librement, dans les limites de la loi. La propriété est définie comme étant « le droit réel le plus complet, procurant dans les limites de la loi la maîtrise totale, exclusive et imprescriptible de l’objet sur lequel elle porte »
9 Il convient de préciser qu’un bien culturel peut être propriété de la Confédération sans pour autant être possédé par celle-ci. En effet, en vertu de l’art. 15 al. 1 de la Loi fédérale sur les musées et les collections de la Confédération du 12 juin 2009 (RS 432.30 ; ci-après : LMC), la Confédération attribue, au Musée national suisse (ci-après : MNS), l’usufruit des biens culturels dont elle est propriétaire. Le droit d’usufruit, régi par les articles 745ss CC, est un droit réel limité qui, contrairement au droit de propriété, ne confère qu’une maîtrise partielle sur la chose.
10 Malgré plusieurs tentatives antérieures, la base légale permettant la création d’un musée national suisse ne vit le jour qu’en 1890 avec l’entrée en vigueur de la Loi fédérale concernant la création d’un musée national suisse du 27 juin 1890.
C. Revêtir une importance significative pour le patrimoine culturel
11 Cette dernière condition contient trois termes fondamentaux, à savoir « importance », « significative » et « patrimoine culturel », qu’il est nécessaire de définir individuellement.
12 La notion d’importance se retrouve également à l’art. 2 al. 1 LTBC qui traite de la définition des biens culturels.
13 Pour que cette troisième condition soit réalisée, encore faut-il que cette importance soit significative, c’est-à-dire intrinsèquement essentielle. Cette exigence restreint davantage le champ des biens culturels pouvant revêtir cette qualité et être, ainsi, inscrits à l’inventaire fédéral. Tout comme la notion d’importance, la qualification de « significatif » est soumise à l’évolution constante des conceptions sociales.
14 Enfin, cette importance, estimée significative, doit l’être pour le patrimoine culturel. Le patrimoine culturel est défini à l’art. 2 al. 2 LTBC qui, pour l’essentiel, renvoie à l’art. 4 de la Convention UNESCO de 1970.
15 Lors de l’adoption de l’Ordonnance sur le transfert international des biens culturels du 13 avril 2005 (RS 444.11 ; ci-après : OTBC)
16 L’art. 2 al. 2 de l’Ordonnance sur l’inventaire fédéral des biens culturels du 21 mai 2014 (RS 444.12 ; ci-après : OIBC) fournit quelques indications permettant de mieux appréhender la notion d’importance significative pour le patrimoine en prévoyant qu’un bien culturel la revêt lorsqu’il remplit au moins l’un des critères suivants :
a. « importance artistique, historique ou scientifique;
b. caractère unique ou rareté;
c. valeur artisanale;
d. importance iconographique;
e. importance historique;
f. importance dans le contexte de la collection;
g. valeur matérielle ».
Bien que, selon l’OIBC, il faille uniquement remplir l’un des critères de manière alternative, en pratique, chaque bien inscrit à l’inventaire satisfait à plusieurs d’entre eux
17 Enfin, il est utile de mentionner que l’art. 7 al. 2 LTBC érige également la notion d’importance significative pour le patrimoine culturel comme condition à la fixation des catégories de biens culturels contenus dans les annexes des accords bilatéraux conclus entre la Suisse et un autre État partie à la Convention UNESCO de 1970.
18 Un bien qui remplit toutes les conditions développées ci-dessus (à savoir : être un bien culturel, appartenir à la Confédération et être d’importance significative pour le patrimoine culturel) peut ainsi être inscrit à l’inventaire fédéral. Le texte de l’art. 3 al. 1 LTBC mentionne que les biens culturels « sont inscrits » dans l’inventaire, ce qui peut sous-entendre que l’inscription s’effectue de manière automatique. Néanmoins, en pratique, il est nécessaire de requérir cette inscription. L’art. 6 OIBC traite précisément de la demande d’inscription d’un bien à l’inventaire fédéral (infra para. 27).
19 Les travaux relatifs à la création de l’inventaire ont débuté dès l’entrée en vigueur de l’OIBC en juillet 2014
III. La procédure d'inscription à l'inventaire
20 Comme son nom l’indique, l’OIBC et son annexe ont pour objet de préciser l’art. 3 LTBC relatif à l’inventaire fédéral. L’art. 1 OIBC prévoit ainsi que l’ordonnance règle les critères d’inscription des biens culturels meubles à l’inventaire (let. a), la procédure d’inscription (let. b ch. 1) et la procédure de radiation (let. b ch. 2) (infra para. 48-54).
21 L’art. 4 OIBC traite de la description des biens culturels inscrits et prévoit que, pour chaque bien, l’inventaire fédéral fait état des informations suivantes, pour autant qu’elles soient connues :
a. « la cote ;
b. la date d’inscription ;
c. le nom de l’institution de la Confédération qui en a la propriété ;
d. le type d’objet ;
e. le matériau ;
f. la technique ;
g. les dimensions et le poids ;
h. les lots, le nombre ou le volume ;
i. les motifs ;
j. les inscriptions ;
k. les marques et les signes particuliers, notamment les dommages et les réparations ;
l. l’époque ou la date de fabrication ;
m. l’auteur ;
n. le titre ;
o. des informations aussi précises que possible sur la provenance et le lieu de fabrication ou, s’il s’agit d’un objet issu de fouilles ou de découvertes archéologiques ou paléontologiques, sur le lieu de sa découverte ;
p. des références bibliographiques avec une table des illustrations, si disponible ;
q. une photographie ou une autre représentation de l’objet ».
Force est de constater que le contenu de chaque inscription est donc assez conséquent. En effet, il s’agit de quelque chose de primordial sur lequel l’accent a été mis afin d’assurer une meilleure protection des biens culturels inscrits. Comme mentionné dans le Rapport national sur la mise en œuvre de la Convention UNESCO de 1970 en Suisse, les informations à fournir en vertu de l’art. 4 OIBC sont basées sur les exigences standardisées des « Object ID »
22 A teneur de la disposition légale, la liste de l’art. 4 OIBC est exhaustive. Certains points, tels que la cote (let. a), la provenance (let. o), ainsi que les institutions de la Confédération (let. b), appellent quelques explications complémentaires.
23 La cote est une référence, constituée en principe de lettres et/ou de nombres, servant à l’identification et au classement d’éléments d’une collection. En vertu de l’art. 3 OIBC, chaque bien culturel inscrit à l’inventaire est identifié par une cote (al. 1) qui est composée conformément à l’annexe (al. 2). Selon cette dernière, la cote est constituée de trois éléments :
l’abréviation de l’institution de la Confédération qui possède le bien ;
le numéro correspondant au type d’objet dont il s’agit ;
les positions supplémentaires ajoutées par l’institution de la Confédération.
24 Dans le cadre de la LTBC, les notions d’origine et de provenance sont considérées comme des synonymes interchangeables, et ce, même s’il s’agit en réalité de deux termes dont la signification diverge.
25 A ce titre, le groupe de travail de l’Office fédéral de la culture a publié, en 1998, un premier rapport d’enquête de provenance relatif aux biens culturels propriétés de la Confédération couvrant la période de 1933 à 1945. Il s’agissait d’examiner les acquisitions faites par diverses institutions de la Confédération (collections d’art de la Confédération, Musées national suisse et Bibliothèque nationale suisse) au cours de cette période particulièrement trouble. Les résultats avaient alors permis de conclure qu’a priori, aucun bien propriété de la Confédération, n’aurait été acquis illégalement ni ne figurait dans les listes d’œuvres spoliées publiées par différents États.
20 ans après sa première publication, l’Office fédéral de la culture s’est adonné à un travail d’actualisation des résultats de recherche de provenance dont la parution s’est effectuée en deux temps (2018 et 2020). Les résultats de cette actualisation ont permis de conclure que la majorité des biens acquis pouvait être considérée comme ne posant pas de problème du point de vue de leur provenance (catégorie A ou B
A toutes fins utiles, il convient de mentionner que, suite à la motion déposée par Jon Pult en 2021
26 Les institutions de la Confédération sont, quant à elles, définies à l’art. 1 let. c OTBC
1. « le Musée national suisse, composé du Musée national de Zurich, du Château de Prangins, du Forum de l’histoire suisse à Schwyz et du Centre des collections d’Affoltern am Albis,
2. la Bibliothèque nationale suisse, à laquelle sont rattachés les Archives littéraires suisses, le Cabinet des estampes et le Centre Dürrenmatt Neuchâtel,
3. le Musée de la collection Oskar Reinhart « Am Römerholz » à Winterthour,
4. le Museo Vela à Ligornetto,
5. le Musée des automates à musique à Seewen,
6. l’Ecole polytechnique fédérale de Zurich et ses collections,
7. la collection d’art et de biens culturels de la Fondation Gottfried Keller,
8. la collection d’art de la Confédération ».
27 La demande d’inscription d’un bien à l’inventaire fédéral est réglée par l’art. 6 al. 1 OIBC qui prévoit que c’est à l’institution de la Confédération qui possède ledit bien de l’introduire. Seule une institution de la Confédération au sens de l’art. 1 let. c OTBC, à l’exclusion des entités publiques cantonales et communales, peut ainsi requérir cette inscription.
28 En vertu de l’art. 7 phrase 1 OIBC, les biens culturels sont considérés comme inscrits dès leur enregistrement dans la banque de données électronique. Par ailleurs, la date d’inscription est consignée dans l’inventaire (art. 4 let b OIBC et art. 7 phrase 2 OIBC).
IV. Les effets de l'inscription à l'inventaire
29 A teneur du Message du Conseil fédéral, la tenue d’un inventaire est « un moyen éprouvé de se prémunir contre la perte de biens culturels importants pour la communauté »
A. Effet relatif à l’impossibilité d’une acquisition par prescription acquisitive (art. 3 al. 2 let. a LTBC)
30 La prescription acquisitive est un mode d’acquisition originaire de la propriété mobilière.
31 Le délai de prescription acquisitive usuel est de 5 ans (art. 728 al. 1 CC). À la suite de l’entrée en vigueur de la LTBC, ce délai a été porté à 30 ans pour les biens culturels (art. 728 al. 1ter CC).
32 Les biens culturels inscrits à l’inventaire bénéficient d’une protection supérieure puisque l’art. 3 al. 2 let. a LTBC prévoit qu’ils ne peuvent tout simplement pas faire l’objet d’une prescription acquisitive, et ce peu importe que le délai de 30 ans soit écoulé. Il s'agit là d'une exception majeure aux règles de prescription acquisitive et qui a été fixée au CC, en son art. 728 al 1ter, lors de l'entrée en vigueur de la LTBC, en faisant un cas d'exception prévu par la loi.
B. Effet relatif à l’impossibilité d’une acquisition de bonne foi (art. 3 al. 2 let. a LTBC)
33 L’acquisition de bonne foi est réglée par l’art. 714 al. 2 CC qui prévoit que « celui qui, étant de bonne foi, est mis à titre de propriétaire d’un meuble en acquiert la propriété, même si l’auteur du transfert n’avait pas qualité pour l’opérer ; la propriété lui est acquise dès qu’il est protégé selon les règles sur la possession [à savoir les art. 933 à 935 CC] ». On dénombre deux situations dans lesquelles l’acquéreur de bonne foi peut devenir propriétaire d’un bien culturel en vertu des règles sur la possession. Il s’agit, en premier lieu, du cas de l’art. 933 CC qui traite de l’acquisition d’un bien mobilier qui avait été confié (en principe par le propriétaire du bien) à celui qui a opéré le transfert de propriété à l’acquéreur de bonne foi. La seconde éventualité est celle d’un acquéreur de bonne foi de choses perdues, volées ou dont le possesseur précédent s’est trouvé dessaisi de quelle qu’autre manière contre son gré.
34 Dans les deux situations précitées, l’acquéreur qui veut pouvoir être protégé dans son acquisition doit être de bonne foi au moment du transfert de propriété. On dit qu’il doit avoir agi « en bonne conscience [et] que tout comportement malhonnête, moralement répréhensible, paraît exclu »
Dans le cas d’espèce, le Tribunal fédéral, chargé d’examiner la bonne foi de l’acquéreur, a conclu que celui-ci ne pouvait in fine pas s’en prévaloir.
35 En règle générale, les biens culturels, à l’exception de ceux inscrits à l’inventaire, peuvent être acquis de bonne foi, à condition de respecter les exigences ordinaires en la matière. L’art. 3 al. 2 let. a LTBC empêche, en effet, l’acquisition de bonne foi des biens culturels inscrits à l’inventaire fédéral. Leur acquisition à l’expiration du délai de prescription de l’art. 934 al. 1bis CC est donc impossible.
36 Quand bien même l’art. 3 al. 2 let. a LTBC ne prévoirait pas un tel effet, l’acquisition de bonne foi d’un bien culturel inscrit à l’inventaire serait quasiment impossible en pratique. L’inventaire fédéral peut être considéré comme un registre public au sens de l’art. 9 CC.
C. Effet relatif à l’imprescriptibilité de l’action en revendication (art. 3 al. 2 let. b LTBC)
37 Il existe deux sortes d’actions ayant pour but le rétablissement de la situation antérieure via la restitution de la chose : l’action en revendication du propriétaire et l’action mobilière du possesseur antérieur.
38 L’action en revendication du propriétaire de l’art. 641 al. 2 CC est une action dite condamnatoire
39 L’action mobilière du possesseur antérieur de l’art. 934 CC, quant à elle, se fonde sur la possession antérieure (et non pas sur la propriété). En effet, la qualité pour l’intenter appartient à tout possesseur antérieur qui s’est trouvé dessaisi du bien sans sa volonté.
40 Depuis l’entrée en vigueur de la LTBC, les biens culturels bénéficient d’un régime particulier puisqu’en vertu de l’art. 934 al. 1bis CC, le délai de péremption est de 30 ans dès le dessaisissement involontaire (délai absolu) et d’un an à compter du moment où le propriétaire a eu connaissance du lieu où se trouve le bien et de l’identité du possesseur actuel (délai relatif).
41 Les biens culturels inscrits à l’inventaire fédéral sont d’autant mieux protégés puisque l’art. 3 al. 2 let. b LTBC prévoit que l’action en revendication est imprescriptible. Il faut comprendre cet effet dans le sens où « la prescription de l’action en revendication n’est pas une exception que le défendeur peut soulever pour paralyser le droit du demandeur »
D. Effet implicite relatif à l’inaliénabilité des biens culturels (res extra commercium)
42 En principe, un propriétaire a le pouvoir de disposer librement de son bien en vertu de l’art. 641 al. 1 CC. Néanmoins, lorsqu’il s’agit de biens faisant partie du patrimoine culturel d’un État, d’autres enjeux doivent être pris en compte
43 Tout comme les biens inscrits à l’inventaire fédéral, les curiosités naturelles et les antiquités ne peuvent faire l’objet d’une prescription acquisitive ni être acquises de bonne foi, et leur action en revendication est imprescriptible (art. 724 al. 1bis phr. 2 et 3 CC).
E. Effet relatif à l’interdiction d’exportation définitive hors de Suisse (art. 3 al. 2 let. c LTBC)
44 Conformément au préambule de la Convention UNESCO de 1970, l’échange de biens culturels entre nations permet d’approfondir la connaissance de la civilisation humaine, d’enrichir la vie culturelle de tous les peuples et de faire naître le respect de l’estime mutuels entre les nations. La circulation licite des biens culturels semble, a priori, être encouragée. Néanmoins, l’art. 3 al. 2 let. c LTBC prévoit que l’exportation définitive hors de Suisse des biens inscrits à l’inventaire est interdite. Effectivement, les biens culturels inscrits à l’inventaire ayant une signification particulière pour le patrimoine culturel national, leur exportation définitive constituerait une perte importante pour la Suisse.
45 Afin de nuancer cette interdiction, une exportation temporaire est toutefois possible à certaines conditions. A teneur des articles 5 al. 1 LTBC et 24 al. 1 OTBC, celui qui entend exporter un bien culturel inscrit à l’inventaire doit obtenir une autorisation du service spécialisé.
46 En cas d’exportation illicite d’un bien culturel inscrit à l’inventaire fédéral, le Conseil fédéral dispose d’un droit d’action de retour à faire valoir auprès des autres États parties à la Convention UNESCO de 1970 (art. 6 al. 1 LTBC).
47 Il existe d’autres mesures qu’un État peut mettre en place afin de protéger ses biens culturels et d’en contrôler la circulation, par exemple l’instauration d’un droit de préemption de l’État en cas de vente. Tel est notamment le cas de l’État français qui, en vertu de l’art. L123-1 du Code du patrimoine, peut exercer un droit de préemption dans le cadre de toute vente publique ou de gré à gré de biens culturels réalisée dans les conditions prévues par l’art. L321-9 du Code de commerce relatif aux ventes volontaires de meubles aux enchères publiques.
V. La procédure de radiation de l'inventaire
48 La liste des biens inscrits à l’inventaire n’est pas définitive puisque l’art. 3 al. 3 LTBC prévoit trois cas de figures dans lesquels un bien peut être radié : s’il ne revêt plus une importance significative pour le patrimoine culturel (let. a), si son incorporation dans un ensemble le justifie (let. b) et si la Confédération perd ses droits de propriété ou y renonce (let. c).
A. Le bien ne revêt plus une importance significative pour le patrimoine culturel (art. 3 al. 3 let. a LTBC)
49 Il s’agit de l’éventualité où la troisième condition de l’art. 3 al. 1 LTBC, nécessaire à l’inscription d’un bien à l’inventaire, n’est plus satisfaite (supra para. 11-16). Dans une telle hypothèse, il est justifié que le bien soit radié de l’inventaire puisqu’il n’est plus conforme aux caractéristiques lui permettant d’y figurer. L’importance significative d’un bien pour le patrimoine culturel étant une notion indéterminée, elle peut varier dans le temps. Il est donc possible qu’un bien perde son importance particulière à un moment donné. Tel serait notamment le cas lorsque de nouvelles découvertes remettraient en question sa valeur en démontrant qu’il s’agirait en réalité d’un faux ou lorsque d’autres biens culturels de même nature seraient acquis par la Confédération et déprécieraient alors la valeur du bien inscrit à l’inventaire.
B. L’incorporation du bien dans un ensemble justifiant sa radiation (art. 3 al. 3 let. b LTBC)
50 Cette seconde hypothèse a trait au cas où la réintégration du bien culturel dans son contexte d’origine, par exemple un édifice religieux, une autre collection, un bâtiment ou autre, nécessite son aliénation.
C. La Confédération perd ses droits de propriété sur le bien ou y renonce (art. 3 al. 3 let. c LTBC)
51 Cette dernière situation correspond au cas où la seconde condition de l’art. 3 al. 1 LTBC nécessaire à l’inscription d’un bien à l’inventaire n’est plus réalisée (supra para. 28). Comme pour la perte d’importance significative pour le patrimoine culturel, il est cohérent de procéder à la radiation du bien inscrit, celui-ci ne réalisant plus les conditions nécessaires afin d’y figurer.
52 La Confédération peut perdre son droit de propriété sur le bien culturel dans le cas où « un tiers fait valoir un droit légitime [sur les biens inscrits], par exemple en prouvant qu’ils lui ont été volés »
53 S’agissant de la renonciation à son droit de propriété, elle peut intervenir si la Confédération découvre que la provenance de son bien est éthiquement contestable (vol ou pillage) et décide volontairement de le restituer.
54 La procédure de radiation est prévue à l’art. 8 OIBC. Lorsque l’une des hypothèses visées à l’art. 3 al. 3 LTBC est réalisée, l’institution de la Confédération qui possède le bien peut demander au service spécialisé sa radiation de l’inventaire, étant précisé que cette demande doit être dûment motivée (art. 8 al. 1 OIBC). En cas d’approbation de la demande par ledit service, celui-ci radie effectivement l’inscription du bien dans la banque de données électronique (art. 8 al. 2 OIBC). En pratique les cas de radiation d’un bien de l’inventaire sont relativement rares.
VI. La forme de l'inventaire et la compétence pour sa tenueE
55 A teneur des articles 3 al. 4 LTBC et 18 let. g LTBC, le service spécialisé est l’organe compétent pour la tenue de l’inventaire fédéral. Il est naturellement également compétent pour décider de l’inscription et de la radiation des biens culturels à l’inventaire (art. 5 al. 2 OIBC). Enfin, comme vu précédemment, le même service est aussi habilité à autoriser l’exportation temporaire d’un bien inscrit à l’inventaire (art. 5 al. 1 LTBC). En vertu des articles 22 al. 1 OTBC et 5 al. 1 OIBC, il est rattaché à l’OFC et se nomme service spécialisé « Transfert international des biens culturels » de l’Office fédéral de la culture.
56 L’art. 3 al. 4 LTBC prévoit également que l’inventaire fédéral est établi sous la forme d’une banque de données électronique et est publié. Sa publication doit être effectuée sur le site internet de l’Office fédéral de la culture (art. 5 al. 1 OIBC). En vertu de l’art. 9 OIBC, l’accès à l’inventaire est gratuit. Le but d’une telle solution est de favoriser sa consultation et d’en permettre une diffusion large en Suisse et à l’étranger.
57 L’inventaire est également à la disposition des organes douaniers dont l’une des tâches est le contrôle des exportations.
58 Conformément aux articles 30 al. 2 LTBC et 21 al. 1 OTBC, le traitement des données personnelles effectué dans le cadre de l’inventaire doit respecter la Loi fédérale sur la protection des données du 25 septembre 2020 (RS 235.1 ; ci-après : LPD).
VII. Les autres inventaires de la LTBC
59 Il existe deux autres inventaires ou registres institués via la LTBC. Il s’agit, d’une part, du registre tenu par les commerçants d’art et les personnes pratiquant la vente aux enchères et, d’autre part, de l’inventaire tenu par les ports francs.
60 Le registre tenu par les commerçants d’art et les personnes pratiquant la vente aux enchères trouve son fondement directement dans la LTBC qui met en œuvre l’engagement pris à l’art. 10 let. a de la Convention UNESCO de 1970. L’art. 16 al. 2 let. c LTBC prévoit donc que les commerçants d’art et les personnes pratiquant la vente aux enchères sont soumis à la tenue d’un registre des acquisitions de biens culturels
61 Le service spécialisé contrôle, entre autres, le respect de l’obligation relative à la tenue du registre et dépose une dénonciation à l’autorité de poursuite pénale compétente, en cas de soupçon d’infraction (art. 17 LTBC).
En pratique, il semblerait que les commerçants d’art et les personnes pratiquant la vente aux enchères respectent assez bien leurs obligations légales en contrôlant plus efficacement les biens transférés.
62 L’inventaire tenu par les ports francs trouve, quant à lui, son fondement dans la Loi sur les douanes du 18 mars 2005 (RS 630.1 ; ci-après LD). Les ports francs sont « des parties du territoire suisse qui sont séparés du reste du territoire douanier et sont sous surveillance douanière »
VIII. Les autres inventaires fédéraux relatifs à la protection du patrimoine culturel
63 Il existe quatre autres inventaires fédéraux d’importance qui servent à la protection du patrimoine culturel suisse. Leurs dispositions ont essentiellement été édictées à l’égard de l’État et de ses diverses autorités administratives. Les particuliers n’y sont que très rarement confrontés.
64 Le premier est l’inventaire suisse des biens culturels d’importance nationale et régionale (Inventaire PBC) dont l’art. 4 let. d de la Loi fédérale sur la protection des biens culturels en cas de conflit armé, de catastrophe ou de situation d’urgence du 20 juin 2014 (RS 520.3 ; ci-après : LPBC) en est le fondement légal. Il recense les biens culturels à protéger en priorité afin d’en éviter la perte partielle ou totale. L’Office fédéral de la protection de la population (OFPP) est chargé de son élaboration et de sa tenue en vertu de l’art. 2 al. 1 de l’Ordonnance sur la protection des biens culturels en cas de conflit armé, de catastrophe ou de situation d’urgence du 29 octobre 2014 (RS 520.31 ; ci-après : PBC). Cet inventaire fait état de deux types de biens : les biens d’importance nationale (objets A) qui figurent en gras et les biens d’importance régionale (objets B) (art. 1 al. 1 let. a et b OPBC cum art. 2 al. 1 OPBC). Les « objets A » sont également reproduits sur le géoportail de la Confédération, géré par l’Office fédéral de topographie, afin d’en faciliter la géolocalisation.
65 Le second est l’inventaire fédéral des sites construits d’importance nationale à protéger en Suisse (Inventaire ISOS). Il se fonde sur l’art. 5 al. 1 de la Loi fédérale sur la protection de la nature et du paysage du 1er juillet 1966 (RS 451 ; ci-après : LPN) qui prévoit que le Conseil fédéral établit des inventaires d’objets d’importance nationale. L’inventaire ISOS n’est pas exhaustif et doit être régulièrement mis à jour (art. 5 al. 2 LPN). L’ordonnance y relative, à savoir l’Ordonnance concernant l’Inventaire fédéral des sites construits à protéger en Suisse du 13 novembre 2019 (RS 451 ; ci-après : OISOS), est entrée en vigueur le 1er janvier 2020. Tout comme l’inventaire fédéral de l’art. 3 LTBC, il est établi par l’Office fédéral de la culture (OFC) (art. 1 al. 2 OISOS) et comprend tous les objets énumérés à l’annexe 1 (art. 1 al. 1 OISOS). Son but est de lister les sites construits de Suisse qui nécessitent une protection particulière, notamment en regard de l’aménagement du territoire. Les critères d’évaluation permettant de déterminer si un site est suffisamment précieux pour être inscrit à l’inventaire sont énumérés à l’art. 8 OISOS. Tout comme les « objets A » de l’inventaire PBC, les sites répertoriés dans l’inventaire ISOS figurent sur le géoportail de la Confédération où ils peuvent être consultés gratuitement (art. 2 al. 2 OISOS).
66 Le troisième est l’inventaire fédéral des paysages, sites et monuments naturels d’importance nationale (Inventaire IFP). Tout comme l’inventaire ISOS, il se fonde sur l’art. 5 LPN. L’Ordonnance concernant l’inventaire fédéral des paysages, sites et monuments naturels du 29 mars 2017 (RS 45.11 ; ci-après : OIFP) est entrée en vigueur le 1er juin 2017. Comme l’inventaire ISOS, il comprend tous les objets listés à l’annexe 1 (art. 1 al. 1 OIFP). Il peut être consulté gratuitement auprès de l’Office fédéral de l’environnement (OFEV) (art. 2 al. 2 OIFP). Cet instrument permet ainsi « de ménager et de protéger l’aspect caractéristique du paysage et des localités, les sites évocateurs du passé, les curiosités naturelles et les monuments du pays, et de promouvoir leur conservation et leur entretien » conformément aux dispositions de l’art. 1 let. a LPN. L’art. 5 al. 1 OIFP prévoit que les caractéristiques paysagères naturelles et culturelles ainsi que les éléments marquants des objets inscrits doivent être conservés intacts. Le patrimoine bâti répertorié dans l’inventaire IFP est également accessible sur le géoportail de la Confédération.
67 Enfin, le dernier est l’inventaire fédéral des voies de communication historiques de la Suisse (Inventaire IVS). Comme les deux inventaires précédents, il se concentre sur la protection du patrimoine bâti et se fonde sur l’art. 5 LPN. Les normes y relatives se trouvent dans l’Ordonnance concernant l’inventaire fédéral des voies de communication historiques de la Suisse du 14 avril 2010 (RS 451.13 ; ci-après : OIVS) qui est entrée en vigueur le 1er juillet 2010. L’inventaire IVS est établi par l’Office fédéral des routes (OFROU) (art. 3 al. 2 OIVS). Il est accessible en ligne sur le géoportail de la Confédération
68 En droit suisse, il est possible de distinguer deux types d’inscriptions en fonction de leurs effets : les inscriptions dites constitutives et celles dites déclaratives. L’état de la recherche en la matière dans le cadre des inventaires relatifs à la protection du patrimoine culturel (qu’il s’agisse de l’inventaire fédéral de l’art. 3 LTBC ou des quatre autres inventaires mentionnés ci-dessus) est relativement peu développé. Il serait alors possible de se référer, par analogie, à la doctrine relative aux divers registres existants et en particulier, au registre du commerce ainsi qu’au registre foncier. À l’instar de l’inventaire, ce sont tous deux des instruments de droit administratif dont le but est d’inventorier et de publier diverses informations. Néanmoins, ces deux outils montrent également certaines différences ce qui implique que l’analogie appliquée peut être considérée comme relativement audacieuse.
Une inscription a un effet constitutif lorsqu’elle est une condition nécessaire à la naissance du rapport de droit sociétal (dans le cadre du registre du commerce), respectivement à la constitution ou à l’acquisition du droit réel (dans le cadre du registre foncier).
Par opposition, une inscription est dite déclarative lorsqu’elle n’est pas nécessaire à la naissance du rapport juridique respectivement du droit réel puisque ceux-ci existent de lege en dehors des registres (extra tabulas)
Précisons que la qualification d’effet constitutif ou déclaratif de l’inscription n’a pas de rapport avec la question de savoir si celle-ci est obligatoire ou facultative.
69 En ce qui concerne les biens culturels, l’inscription à l’inventaire fédéral de l’art. 3 LTBC semble être constitutive en ce sens qu’elle serait la condition nécessaire pour que le bien puisse alors bénéficier des divers effets prévus à l’art. 3 al. 2 LTBC. Les inscriptions de biens, meubles ou immeubles, à l’un des autres inventaires fédéraux de protection du patrimoine culturels pourraient également être considérées comme constitutives puisqu’elles les soumettent à un régime de protection particulier. A priori, le fait de les considérer comme constitutives n’exclut pas le fait qu’elles pourraient également être déclaratives.



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