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I. Historique, systématique et importance de la disposition
1 Comme l’indique son intitulé, qui est le même dans les trois versions linguistiques, l’art. 14 traite du procès-verbal de la votation et ne s’applique, à l’instar des autres dispositions du titre 2, qu’aux votations (fédérales), et non aux élections, comme on l’a déjà relevé pour ces autres dispositions
2 L’art. 14 existait presque avec la même formulation que le texte actuel dans la version d’origine de la loi, en 1976
3 La disposition n’a connu, depuis, que deux modifications, d’importance relativement mineure. Tout d’abord, l’alinéa 1er a été légèrement étoffé, lors de la révision du 21 juin 1996, entrée en vigueur le 1er novembre 1997, pour compléter la liste des rubriques que doit contenir le procès-verbal, par l’adjonction de la mention, à côté du nombre des électrices et des électeurs inscrits, de celui des Suissesses et des Suisses de l’étranger (« y compris celui des Suisses de l’étranger »)
4 La seconde modification de l’art. 14 concerne l’alinéa 2, qui a été précisé lors de la révision partielle de la loi du 21 juin 2002, entrée en vigueur le 1er janvier 2003
5 L’alinéa 3 n’a pour sa part subi aucune modification depuis l’entrée en vigueur de la loi, en 1978.
6 S’agissant de sa structure, l’art. 14 se compose donc de trois alinéas, qui traitent de l’établissement du procès-verbal des votations par le bureau de vote, et du contenu de ce procès-verbal (al. 1er), ainsi que de la transmission de ce procès-verbal au gouvernement cantonal, pour récapitulation des résultats provisoires dans le canton, dans un premier temps (al. 2), puis de la transmission de ces résultats à la Chancellerie fédérale, dans un second temps (al. 3). On reviendra plus loin, dans le commentaire proprement dit (ch. II), sur chacun de ces alinéas.
7 S’agissant de l’importance de la disposition en général, on peut renvoyer à ce qui a déjà été dit dans le commentaire des art. 10 à 13, sur la signification et l’importance fondamentale des règles qui régissent l’organisation des votations populaires dans le système constitutionnel et politique suisse, caractérisé par une (très) forte dose de démocratie directe
8 Tous les cantons ont ainsi, pour leur domaine, et selon des formes différentes, des dispositions analogues à l’art. 14, qui traitent du dépouillement des scrutins, du décompte des résultats et de la documentation de ces opérations
II. Commentaire
A. Alinéa 1er : l’établissement et le contenu du procès-verbal de la votation
9 L’alinéa 1er de l’art. 14 dispose qu’« [a]près chaque votation, les responsables de chaque bureau de vote dressent un procès-verbal dans lequel ils indiquent le nombre total des électeurs inscrits, y compris celui des Suisses de l’étranger, le nombre des votants, le nombre des bulletins blancs, des bulletins nuls et des bulletins valables, ainsi que le nombre des électeurs qui ont accepté le projet et le nombre de ceux qui l’ont rejeté ». La disposition traite donc de l’établissement du procès-verbal et de son contenu.
10 Comme cela ressort du texte de la disposition, l’obligation d’établir un procès-verbal incombe aux « responsables de chaque bureau de vote », et ce « après chaque votation ». On devrait dire, plutôt, pour chaque objet soumis à votation, dans la mesure où un procès-verbal séparé est prévu pour chacun de ces objets (voir le N 13 ci-dessous). Il y aura donc autant de procès-verbaux qu’il y a, dans chaque canton, de bureaux de vote, multipliés par le nombre d’objets soumis à la votation à la date en question.
11 Il faut préciser à ce stade que la loi fédérale ne règle pas la question des bureaux de vote
12 Si elle est muette sur les bureaux de vote, la loi fédérale règle en revanche le contenu du procès-verbal que chacun de ces bureaux doit remplir, en ce sens que l’alinéa 1er de l’art. 14 énumère les diverses rubriques ou mentions qui doivent obligatoirement figurer dans ce document, à savoir « le nombre total des électeurs inscrits, y compris celui des Suisses de l’étranger, le nombre des votants, le nombre des bulletins blancs, des bulletins nuls et des bulletins valables, ainsi que le nombre des électeurs qui ont accepté le projet et le nombre de ceux qui l’ont rejeté ». Comme le soulignait le message du Conseil fédéral, les « indications exigées par le 1er alinéa sont indispensables pour vérifier les données relatives à la majorité déterminante » au sens de l’art. 13 LDP, et pour décider en conséquence du résultat de la votation
13 Le droit fédéral traite non seulement du contenu du procès-verbal, mais aussi de la forme que celui-ci doit revêtir. L’ordonnance sur les droits politiques prévoit en effet, à son art. 4 al. 1er, que ce « procès-verbal doit être établi selon le modèle figurant à l’annexe 1a (cas normal) ou 1b (initiative et contre-projet) ». Ces deux annexes comprennent ainsi deux modèles différents de procès-verbal
B. Alinéa 2 : l’établissement des résultats provisoires dans le canton et leur communication à la Chancellerie fédérale
14 Aux termes de l’alinéa 2 de l’art. 14, le procès-verbal est ensuite « transmis au gouvernement cantonal », afin que celui-ci « procède à la récapitulation des résultats provisoires pour tout le canton, les communique à la Chancellerie fédérale et les publie dans la feuille officielle du canton dans les 13 jours qui suivent le jour de la votation. Au besoin, il publie les résultats dans un numéro à part ».
15 Dans chaque canton, le Gouvernement cantonal a donc la tâche de centraliser les procès-verbaux, sur la base desquels il « récapitule les chiffres et communique les totaux provisoires à la Chancellerie »
16 L’art. 5 al. 3 ODP rappelle et précise pour sa part le contenu de ces résultats provisoires tels qu’ils doivent être transmis au service fédéral : « Les résultats provisoires des communes et du canton transmis par le service central cantonal comprennent : a. le nombre d’électeurs ; b. le nombre de oui et de non, de bulletin blancs et de bulletins nuls ; c. en sus, lorsqu’il s’agit d’initiatives populaires accompagnées d’un contre-projet, le nombre de voix inscrit pour chacune des trois questions dans le procès-verbal sous la rubrique "sans réponse" et le nombre de voix recueillies, à la question subsidiaire, par l’initiative populaire et par le contre-projet ».
17 Enfin, l’alinéa 4 de l’art. 5 ODP prescrit que ces « résultats provisoires ne doivent pas être rendus publics avant le jour fixé pour la votation, à 12 heures ».
18 Néanmoins, et sous cette réserve, l’art. 14 al. 2 de la loi prévoit, dans sa seconde partie, qu’il appartient au Gouvernement cantonal de publier ces résultats provisoires (cantonaux) « dans la feuille officielle du canton », et ce au plus tard « dans les 13 jours qui suivent le jour de la votation » ; la disposition précise même que, « [a]u besoin, il publie les résultats dans un numéro à part ». Comme le rappelait le message du Conseil fédéral, cette publication des résultats provisoires dans la feuille officielle du canton est importante, dans la mesure où elle constitue le point de départ du délai de recours pour d’éventuelles contestations de ces résultats
« Le délai de recours en matière de droit de vote – 2e alinéa – commence à courir dès la notification du résultat cantonal provisoire de la votation dans l’organe des publications officielles (art. 75, 2e al.). »
19 Comme on l’a vu
« La nouveauté consiste à donner aux cantons treize jours au maximum pour publier les résultats dans leur feuille officielle, faute de quoi la validation des résultats au niveau national ne pourra plus être faite à temps, la réforme de la justice induite par la nouvelle Constitution ayant fait du Tribunal fédéral la nouvelle instance de recours (art. 189, al. 1, let. f, Cst.), laquelle était précédemment le Conseil fédéral. Ceci étant, ce dernier ne pourra plus décider lui-même et simultanément valider le résultat de la votation (cf. les art. 15 et 81 LDP), ce qui entraînera des retards. Il faut donc prendre des mesures qui empêcheront tout blocage du bon fonctionnement de la démocratie, blocage qui pourrait résulter d’un flot de recours savamment orchestré (cf. encore le commentaire de l’art. 15). L’une de ces mesures consistera à fixer aux autorités cantonales un délai de publication des résultats de leur canton dans leur feuille officielle, au besoin dans un numéro spécial, le procédé étant celui qui est utilisé pour les élections fédérales (cf. le commentaire de l’art. 52, al. 2). »
20 L’art. 6 ODP complète sur ce point la disposition légale, et la précise, en prévoyant que « [l]e gouvernement cantonal publie immédiatement le contenu du procès-verbal de la votation, à l’exclusion de toute observation ou décision, dans la feuille officielle cantonale. Il indique les voies de recours au sens de l’art. 77 LDP ».
C. Alinéa 3 : la transmission des procès-verbaux à la Chancellerie fédérale et la destruction des bulletins de vote
21 Aux termes de l’alinéa 3 de l’art. 14, « [l]es cantons transmettent les procès-verbaux et, sur demande, également les bulletins de vote, dans les dix jours qui suivent l’échéance du délai de recours (art. 79, al. 3), à la Chancellerie fédérale. Après la validation du résultat de la votation, les bulletins de vote sont détruits ». La disposition, qui n’a subi aucune modification depuis l’entrée en vigueur de la loi, en 1978, traite donc de la transmission à la Chancellerie fédérale des procès-verbaux – et non plus des résultats provisoires –, une fois les délais de recours échus, d’une part, et de la destruction des bulletins de vote, d’autre part.
1. Première phrase : la transmission des procès-verbaux
22 Pour ce qui est des procès-verbaux, la disposition prévoit que ceux-ci sont transmis à la Chancellerie fédérale, par les cantons, « dans les dix jours qui suivent l’échéance du délai de recours (art. 79, al. 3) ». L’art. 79 al. 3 LDP, auquel il est renvoyé, dispose que « le gouvernement cantonal notifie sa décision sur recours et les autres mesures prises conformément aux art. 34 à 38 et 61, al. 2, de la loi fédérale du 20 décembre 1968 sur la procédure administrative et les communique aussi à la Chancellerie fédérale »
23 C’est donc à compter de l’échéance de ce délai de cinq jours pour les éventuels recours contre la décision sur recours du Gouvernement cantonal que court le délai de dix jours dans lequel le canton doit transmettre à la Chancellerie fédérale les procès-verbaux des votations.
24 Logiquement, s’il n’y a pas eu de recours au Gouvernement cantonal, cette transmission doit advenir plus tôt, au maximum dans les dix jours qui suivent l’échéance du délai de recours auprès du Gouvernement cantonal, soit le délai de trois jours dès « la découverte du motif du recours, mais au plus tard le troisième jour après la publication des résultats dans la feuille officielle du canton » (art. 77 al. 2 LDP).
25 Sur demande de la Chancellerie fédérale, les cantons doivent lui transmettre aussi, et dans le même délai, les bulletins de vote.
2. Seconde phrase : la destruction des bulletins de vote (et celle des procès-verbaux)
26 La seconde phrase de l’alinéa 3 traite, on l’a dit, de la destruction des bulletins de vote, en disposant : « Après la validation du résultat de la votation, les bulletins de vote sont détruits ». Le texte de la disposition se réfère donc, explicitement, comme moment déterminant pour cette destruction, à la validation des résultats, validation qui est elle-même régie par l’art. 15 LDP.
27 Le message du Conseil fédéral donnait à ce propos l’explication suivante
« Le 3e alinéa précise qu’après la validation du résultat de la votation, les bulletins de vote sont détruits. Le droit actuel ordonne aux cantons de tenir les bulletins de vote à la disposition du Conseil fédéral. Cette disposition n'est pas claire. »
28 L’idée est donc, pour reprendre les termes de l’art. 15 al. 1 LDP, d’attendre que le « Conseil fédéral constate le résultat définitif de la votation (validation) dès qu’il est établi qu’aucun recours n’a été déposé devant le Tribunal fédéral ou dès que les arrêts rendus sur de tels recours sont prononcés » avant de procéder à la destruction des bulletins de vote.
29 On précisera encore que l’art. 4 al. 3 ODP traite pour sa part de la destruction non pas des bulletins de vote, mais des procès-verbaux des votations, en prescrivant que « [l]a Chancellerie fédérale fixe le moment à partir duquel les procès-verbaux peuvent être détruits ».
L’auteur remercie M. Beat Kuoni, juriste au Service des « Droits politiques » de la Chancellerie fédérale, de sa relecture attentive de cette contribution.
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