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CODE PÉNAL SUISSE
CYBERCRIME CONVENTION
ORDONNANCE SUR LE REGISTRE DU COMMERCE
I. Objet de la réglementation et notion de décision
1 Lorsqu'une reconnaissance est demandée en vertu de l'article 33 de la CL, il incombe au requérant de prouver qu'il existe une décision au sens de la convention. Il s'agit d'une condition positive de reconnaissance. L'art. 32 CL détermine de manière autonome quels titres juridiques sont considérés comme des décisions au sens de la convention et peuvent donc être reconnus et déclarés exécutoires. L'art. 32 CL n'offre toutefois guère d'indications sur les critères d'existence d'une décision. Il se contente de préciser que le terme "décision" désigne toute décision rendue par une juridiction conventionnelle. En outre, la disposition fournit une liste non exhaustive des actes couverts par la notion de décision. Pour le reste, l'art. 32 CL ne donne aucune indication sur le contenu de la décision. Au contraire, la notion de décision ne doit justement pas être interprétée de manière restrictive.
2 Pour que la décision puisse être reconnue, tant sa dénomination que le type de procédure dans laquelle elle a été rendue sont donc en principe sans importance. Ainsi, les décisions relatives à l'octroi de la protection juridique dans les cas clairs selon l'art. 257 CPC sont également couvertes par l'art. 32 CL. La notion de décision englobe aussi bien les décisions finales, qui mettent fin à la procédure (devant l'instance concernée), que les décisions partielles, qui jugent exclusivement une partie des demandes accumulées objectivement ou subjectivement. De même, les décisions incidentes, qui statuent sur certaines questions préliminaires sans toutefois clore la procédure principale devant l'instance concernée, peuvent en principe être reconnues. Enfin, la forme et le contenu n'entrent pas non plus en ligne de compte pour la qualification de décision au sens de l'art. 32 CL. Dans ce sens, aucun examen du contenu du bien-fondé de la prétention invoquée n'est non plus présupposé, raison pour laquelle les jugements par défaut peuvent en principe être reconnus et déclarés exécutoires en vertu de la convention.
3 Malgré l'absence de prescriptions quant au contenu, il faut au moins supposer que la décision produit des effets juridiques qui peuvent être reconnus ou déclarés exécutoires par-delà les frontières. Ainsi, pour être qualifiée de décision au sens de l'art. 32 CL, il faut d'une part que la décision produise des effets juridiques susceptibles de faire l'objet d'une reconnaissance ou d'une déclaration exécutoire transfrontalière. D'autre part, la décision doit avoir été rendue par un tribunal au sens de l'art. 62 CL.
A. Effets transfrontaliers
4 Seuls les effets juridiques (potentiellement) transfrontaliers peuvent faire l'objet d'une reconnaissance ou d'une déclaration constatant la force exécutoire en vertu de la convention. Ainsi, les titres qui n'ont qu'un effet interne à la procédure (comme les décisions d'instruction ou les décisions d'organisation de la procédure qui statuent exclusivement sur la poursuite de la procédure) ne peuvent pas être reconnus ou déclarés exécutoires en vertu de la convention. Il en va de même pour les décisions qui, de par leur objet, sont limitées au territoire de l'Etat de jugement.
5 En revanche, la reconnaissance ou la déclaration constatant la force exécutoire d'une décision en vertu de la convention n'est pas subordonnée à la condition que la décision soit passée en force de chose jugée. Par conséquent, une décision peut être reconnue si elle fait l'objet d'un recours ordinaire dans l'État d'origine. L'art. 37 al. 1 CL prévoit certes dans ce cas de figure que le tribunal de reconnaissance "peut" suspendre la procédure. Il n'est toutefois pas obligé de le faire. Pour la déclaration constatant la force exécutoire, il faut au moins que la décision soit exécutoire par provision dans l'État d'origine (art. 38 al. 1 CL). Il suffit que la décision soit juridiquement exécutoire. En revanche, il est sans importance que la décision ne puisse pas être exécutée dans l'État d'origine pour des raisons de fait. Cela s'explique par le fait que la convention ne règle que l'admission à l'exécution forcée et non l'exécution forcée elle-même. Cette dernière est réservée au droit national de l'État d'exécution.
6 Les mesures provisoires sont également couvertes par la notion de décision. Pour que de telles mesures puissent être reconnues et exécutées en vertu de la convention, il faut, selon la jurisprudence de la CJCE, que la partie adverse ait été entendue. Or, le droit d'être entendu est déjà respecté s'il y a eu la possibilité de s'opposer à la décision ou de faire appel. Pour qu'une décision puisse être reconnue, il suffit donc qu'il y ait la possibilité d'une procédure contradictoire, et ce avant que ne se pose la question de sa reconnaissance ou de son exécution. Ne peuvent donc pas être reconnues les mesures superprovisoires qui sont prises sans que la partie adverse soit entendue.
7 En ce qui concerne les mesures provisoires prises sur la base de l'art. 31 CL, il existe, selon la jurisprudence de la CJCE, des conditions supplémentaires qui doivent également être examinées dans le cadre de la procédure de déclaration constatant la force exécutoire. D'une part, il doit exister un lien réel entre l'objet de la mesure et le territoire du for revendiqué pour l'adoption de la mesure. D'autre part, le caractère provisoire de la mesure doit être préservé. Dans le cas des mesures de prestations, cela suppose que le remboursement soit garanti au cas où le requérant ne serait pas débouté dans l'affaire principale. La Cour lie ces conditions à la reconnaissance ou à la force exécutoire de telles mesures. Par conséquent, si ces conditions ne sont pas remplies, ces mesures ne peuvent pas être reconnues ou déclarées exécutoires en vertu des dispositions de la convention.
8 La question de savoir dans quelle mesure les décisions de justice (c'est-à-dire les décisions qui statuent sur l'existence d'une condition préalable à la procédure) peuvent être reconnues est controversée. Dans sa jurisprudence Gotha, la CJCE a retenu qu'une décision par laquelle un tribunal d'un État membre déclinait sa compétence (internationale) en raison d'un accord d'élection de for était couverte par la notion de décision au sens de l'art. 32 aRTCE [art. 32 CL]. Il n'est pas clair si cela signifie que toutes les décisions judiciaires peuvent être reconnues. L'exposé des motifs de l'arrêt Gotha indique certes que la notion de décision doit être comprise de manière large dans le sens de la promotion de la libre circulation des jugements et qu'elle devrait donc en principe englober toutes les décisions de justice. Une exception devrait toutefois s'appliquer dans la mesure où la décision de justice, de par son contenu, ne vise qu'à déployer des effets intra-territoriaux et précisément pas des effets internationaux (par exemple une décision d'incompétence en raison d'un manque d'autorisation d'agir ou d'un manque de compétence matérielle).
B. Tribunal de l'État contractant (art. 62 CL)
9 La définition du tribunal étatique conventionnel résulte de l'art. 62 CL de manière autonome par rapport au traité. Contrairement à l'ancienne CL, qui ne qualifiait en principe que les autorités judiciaires de tribunaux au sens de la convention, l'art. 62 CL étend la notion de tribunal aux autorités administratives. Selon l'art. 62 CL, le terme "tribunal" englobe toute autorité désignée par un État contractant comme compétente dans les domaines juridiques couverts par le champ d'application de la convention. Il résulte de cette définition que toute autorité étatique ("toute autorité") compétente pour connaître d'une affaire civile ou commerciale est en principe couverte par la notion de tribunal au sens de l'art. 62 CL.
10 La qualification de juridiction au sens de l'art. 62 ou de l'art. 32 CL est donc déterminée par la fonction exercée par l'autorité étatique et non par sa classification formelle et organisationnelle dans le droit national (notion de juridiction fonctionnelle). En conséquence, la désignation de l'autorité dans le droit national ou le type de juridiction ne sont pas déterminants. Par conséquent, les décisions des tribunaux pénaux ou administratifs peuvent être reconnues en vertu de la Convention, dans la mesure où elles sont couvertes par le champ d'application matériel. Par exemple, les décisions d'une juridiction pénale sur des prétentions civiles dans le cadre d'une action en adhésion peuvent tout à fait être reconnues en vertu de la Convention. De même, il n'est pas nécessaire que la décision ait été rendue par un juge. Les décisions d'un greffier ou d'un auxiliaire de justice compétent peuvent également être reconnues. L'approche fonctionnelle présuppose toutefois que l'autorité ait également une fonction juridictionnelle correspondante. Dans l'esprit de la jurisprudence Solo Kleinmotoren de la CJCE, il convient donc de supposer, dans le cas de décisions, que l'autorité peut, en vertu de sa mission, trancher elle-même les points litigieux existant entre les parties.
11 Sur la base de cette considération, la qualification de juridiction au sens de l'art. 32 CL est soumise à deux conditions : d'une part, il doit s'agir d'une autorité étatique. Il convient de tenir compte du fait que l'Union européenne elle-même est considérée comme un État partie à la convention. Par conséquent, les différents tribunaux et offices de l'UE sont également couverts (comme l'Office de l'Union européenne pour la propriété intellectuelle [EUIPO] ou la Cour de justice des Communautés européennes ; cf. art. 1, al. 3, CL). Sont également concernés les tribunaux communs à plusieurs États contractants (comme la Cour de justice du Benelux), dans la mesure où les États contractants leur ont confié des tâches juridictionnelles. En revanche, les décisions d'autres tribunaux ou autorités supranationales (comme les organes de la CEDH) ne sont pas considérées comme des tribunaux au sens de l'art. 62 CL, car ces institutions ne sont justement pas des tribunaux d'un État contractant. En outre, les formations de jugement privées (comme les tribunaux d'arbitrage, les tribunaux d'associations ou les tribunaux ecclésiastiques) ne doivent pas non plus être qualifiées de tribunaux au sens de l'art. 62 CL. D'autre part, il faut supposer que l'autorité de décision dispose d'un pouvoir de décision pour le cas en question. Par conséquent, il faut au moins une base d'habilitation dans un acte de souveraineté de l'État qui déclare l'autorité décisive compétente pour trancher le litige en question.
12 Il n'est pas clair dans quelle mesure la décision doit être précédée d'une procédure judiciaire. En ce qui concerne la notion de décision au sens de l'article 2, paragraphe 1, point a), du règlement Bruxelles I, la CJCE a constaté que le principe de confiance présuppose que les décisions soient rendues dans le cadre d'une procédure judiciaire offrant des garanties d'indépendance et d'impartialité et respectant le principe du contradictoire. De même, la doctrine exige que l'autorité de décision remplisse les conditions d'un tribunal indépendant et impartial selon l'article 6 CEDH. Ces réflexions ne peuvent toutefois pas être transposées sans autre à la notion de tribunal de la CL. A l'instar de l'ancienne CL, la notion de juridiction de la Convention de Bruxelles est également limitée aux autorités judiciaires. En conséquence, il semble justifié de déterminer cette notion sur la base des caractéristiques d'un tribunal selon l'art. 6, al. 1, CEDH. Ainsi, l'art. 6, ch. 1, CEDH peut tout à fait être reconnu comme l'expression d'un standard européen de l'État de droit et donc aussi d'un standard minimum à adresser à un tribunal.
13 Dans le cadre de la CL, on a toutefois expressément renoncé à la condition d'un tribunal en tant qu'autorité de décision. Il n'est donc pas possible de déduire de la convention elle-même d'autres conditions relatives à la procédure à mener. Une telle obligation peut toutefois être déduite de la CEDH, qui prévoit différentes garanties procédurales à l'article 6, paragraphe 1, CEDH. La reconnaissance de décisions qui violent ces garanties procédurales peut être refusée sur la base de la réserve formelle d'ordre public selon l'art. 34, point 1, de la Convention de Lugano. L'art. 6 al. 1 CEDH prévoit notamment le droit pour toute partie de voir ses prétentions civiles examinées par un tribunal indépendant, impartial et établi par la loi, dans le cadre d'un procès équitable. On peut en déduire que la personne concernée doit au moins avoir la possibilité de contester des mesures devant un tribunal qui peut statuer sur toutes les questions de fait et de droit pertinentes. Il est toutefois tout à fait compatible avec cette disposition de considérer une décision administrative comme une décision au sens de l'art. 32 CL, dans la mesure où il existait au moins la possibilité d'un contrôle judiciaire de la décision dans l'État d'origine avant la reconnaissance.
II. Questions particulières
A. Décisions des autorités de conciliation
14 Les autorités de conciliation peuvent être qualifiées de juridictions au sens de l'art. 62 ou de l'art. 32 CL. Pour être considérée comme une décision au sens de l'art. 32 CL, il faut toutefois que l'autorité de conciliation dispose d'une compétence décisionnelle au sens des art. 210 ss CPC. CPC. La CJCE a certes retenu dans Schlömp que pour établir la litispendance selon l'art. 30 al. 1 CL, les autorités de conciliation doivent être qualifiées de tribunaux. Cette constatation n'est toutefois qu'en apparence en contradiction avec le pouvoir de décision légal qui doit être présupposé. Il convient de rappeler que l'art. 62 CL poursuit précisément une approche fonctionnelle et se fonde donc sur la fonction à exercer conformément à la base légale. Dans le droit suisse de la procédure civile, l'autorité de conciliation a généralement la fonction d'instance introductive d'instance (art. 197 CPC). Dans ce sens, le dépôt d'une requête de conciliation déclenche également la litispendance en droit suisse de procédure civile (art. 62 al. 1 CPC). En revanche, l'autorité de conciliation, à l'exception des constellations des art. 210 ss. CPC, la compétence de trancher le litige civil en cours entre les parties n'est justement pas attribuée. En conséquence, les autorités de conciliation ne peuvent pas non plus être qualifiées de tribunaux au sens de l'art. 32 CL en dehors de ces constellations. C'est pourquoi, par exemple, une autorisation de procéder ne constitue pas non plus une décision au sens de l'art. 32 CL (outre le fait qu'elle n'a de toute façon qu'un effet intraprocédural et ne produit donc pas d'effets susceptibles d'être reconnus). La situation est moins claire pour les propositions de jugement. Ainsi, selon l'art. 211 al. 1 CPC, une proposition de jugement est considérée comme acceptée et a les effets d'une décision exécutoire si elle n'est pas rejetée par une partie dans les vingt jours. Toutefois, si l'une des parties rejette la proposition de jugement, l'autorité de conciliation se voit rétroactivement privée de sa compétence décisionnelle. Dans ce cas, l'autorité de conciliation n'a justement plus de fonction décisionnelle, raison pour laquelle elle ne peut plus être considérée comme un tribunal au sens de l'art. 32 CL. En conséquence, une proposition de jugement ne devrait être considérée comme une décision au sens de l'art. 32 CL qu'après l'expiration du délai de 20 jours et la constatation de l'entrée en force par l'autorité de conciliation.
B. Décisions d'exequatur
15 Les décisions qui reconnaissent ou déclarent exécutoires des jugements d'autres États contractants (appelées décisions d'exequatur) ne peuvent pas être reconnues au sens des art. 32 ss LLC. CL (interdiction du double exequatur). Cela découle du fait qu'en vertu des dispositions de la convention relatives à la reconnaissance et à la déclaration de la force exécutoire, chaque État contractant doit décider de manière autonome si les conditions de reconnaissance sont remplies. Il en va de même pour les décisions qui reconnaissent ou déclarent exécutoire un jugement d'un État tiers. De telles décisions ne participent pas non plus à la libre circulation des titres de la convention.
16 En revanche, les décisions d'un État contractant qui modifient un titre d'un État contractant ou d'un État tiers peuvent faire l'objet d'une reconnaissance ou d'une déclaration constatant la force exécutoire par-delà les frontières. Il est toutefois essentiel que la décision antérieure entre les mêmes parties et sur le même objet du litige soit remplacée ou modifiée dans son résultat.
C. Décisions de la LP
1. Décisions relatives à une procédure de faillite
17 En ce qui concerne les décisions rendues dans le cadre de procédures de la LP, il convient tout d'abord de tenir compte de l'art. 1, al. 2, let. b, de la Convention de Lugano. Selon cet article, les faillites, concordats et procédures analogues sont exclus du champ d'application matériel de la Convention. Les décisions issues de telles procédures ne sont pas non plus couvertes par la Convention.
2. Mesures d'exécution
18 Il convient en outre de tenir compte du fait que le droit suisse de la poursuite pour dettes et de la faillite se caractérise par une imbrication particulièrement étroite de la procédure de reconnaissance et de la procédure d'exécution. Ainsi, la procédure de poursuite suisse présente une double nature, à savoir une procédure de production de titres et une procédure d'exécution de titres. Il en résulte des difficultés importantes lors de l'attribution au système de reconnaissance et de déclaration de la force exécutoire de la convention.
19 D'une part, dans le cadre de la LP, la délimitation entre les mesures d'exécution pures et les titres exécutoires s'avère particulièrement difficile. La délimitation concrète doit être effectuée de manière autonome par rapport au traité international et selon des critères fonctionnels. Sont considérées comme des mesures d'exécution les mesures qui servent à l'introduction ou à l'exécution de la procédure d'exécution. L'essentiel est que de telles mesures ne tranchent pas de litige entre les parties et servent exclusivement à l'exécution forcée du droit. Étant donné que l'exécution proprement dite relève exclusivement du droit national, les mesures d'exécution pures ne sont pas non plus reconnues et exécutées conformément aux art. 32 ss Lugano. Convention de Lugano.
20 C'est pourquoi il convient, à mon avis, de différencier les mesures d'exécution et les titres exécutoires proprement dits selon les critères suivants. Les actes d'exécution qui servent exclusivement à l'exécution forcée d'une prétention juridique déjà reconnue par un tribunal doivent être qualifiés de mesures d'exécution (en font partie, par exemple, les décisions de saisie). Toutefois, dans la mesure où l'acte d'exécution permet également de (co)décider d'un point litigieux entre les parties, cet acte doit en principe être qualifié de titre exécutoire couvert par l'art. 32 CL.
3. Limitation à la procédure de poursuite engagée
21 D'autre part, les titres juridiques de la LP posent également des problèmes d'attribution dans la mesure où leurs effets en matière de droit des poursuites sont limités à la procédure de poursuite engagée sur le territoire national. Par conséquent, dans la mesure où des titres juridiques déploient exclusivement des effets de droit de la poursuite et non de droit matériel (comme par exemple la décision de mainlevée ou le commandement de payer non titré et non contesté), la décision en soi est limitée, de par son objet, à la procédure de poursuite engagée. En raison de cette limitation (matérielle et, en fin de compte, territoriale), une partie de la doctrine soutient que de tels titres ne peuvent pas être reconnus et déclarés exécutoires selon les dispositions de la Convention.
22 D'un côté, une telle opinion est tout à fait défendable et trouve une certaine confirmation dans la jurisprudence de la CJCE relative aux conséquences juridiques d'une déclaration de force exécutoire. Ainsi, la CJCE a constaté qu'il n'est pas acceptable de reconnaître à une décision, lors de sa déclaration constatant la force exécutoire, des effets juridiques qu'elle n'a pas dans l'État d'origine. Or, en cas de déclaration constatant la force exécutoire, un titre de la LP relevant purement du droit des poursuites se verrait justement attribuer dans l'État d'exécution un effet plus étendu que dans l'État d'origine. Ainsi, la déclaration d'exequatur conférerait au titre (contrairement à la Suisse) un effet en dehors de la procédure de poursuite en cours. D'un autre côté, cette restriction est également due à la particularité de la procédure de poursuite suisse, selon laquelle il est possible d'accéder à l'ensemble du patrimoine du débiteur situé en Suisse dès la procédure en cours. Il n'y a donc en soi aucune raison d'engager une autre procédure de poursuite sur la base du même titre. En conclusion, il s'agit donc d'une limitation territoriale des effets d'un commandement de payer imposée par le droit national. Il est toutefois pour le moins douteux que les dispositions relatives à la libre circulation des jugements de la Convention soient à la disposition des États contractants. Ainsi, il devrait en soi être interdit au droit national d'un État contractant d'exclure la reconnaissance et l'exécution d'une décision en vertu de la CL. En conséquence, il convient à mon avis de privilégier une perspective internationale en ce qui concerne cette restriction, dans l'optique de la libre circulation des jugements. Il convient donc d'examiner si, indépendamment de la limitation à la procédure de poursuite imposée par le droit national, les décisions produisent des effets juridiques susceptibles de faire l'objet d'une reconnaissance ou d'une déclaration d'exequatur transfrontalières.
4. Injonction de payer
23 Si l'injonction de payer non contestée a été délivrée sur la base d'un jugement ou d'un substitut de jugement (ce qu'on appelle une injonction de payer titrée), l'injonction de payer ne constitue pas un titre exécutoire en soi. Il indique simplement que la décision sur laquelle il se fonde est exécutoire. La libre circulation des titres de la Convention (dans la mesure où le champ d'application matériel est couvert) concerne donc exclusivement la décision de base qui est considérée comme exécutoire sur la base du commandement de payer (art. 38, al. 1, CL).
24 La question de savoir si un commandement de payer non titré et non frappé d'opposition doit être considéré comme une décision au sens de l'art. 32 CL est nettement plus controversée. Certains font valoir que l'injonction de payer est une simple mesure d'exécution. Il faut cependant tenir compte du fait que le commandement de payer a une double nature. Il s'agit d'abord d'une simple demande officielle de paiement qui introduit la procédure d'exécution forcée prévue. Dans cette fonction, le commandement de payer ne constitue qu'une partie de la procédure d'exécution forcée et représente en fait une simple mesure d'exécution. Toutefois, si l'entreprise ne fait pas opposition ou si une éventuelle opposition est levée, le commandement de payer devient "exécutoire" et constitue un titre exécutoire de fait. La notion large de décision selon l'art. 32 CL englobe en soi tous les titres exécutoires. Cela résulte également de la jurisprudence de la CJCE, dans laquelle des titres exécutoires fonctionnellement équivalents au commandement de payer suisse (comme le decreto ingiuntivo italien) ont été qualifiés de décisions au sens de l'art. 32 CL. En outre, comme on le sait, l'art. 32 CL mentionne l'injonction de payer comme exemple de décision, ce qui a permis d'étendre la notion de décision en soi aux titres d'injonction de payer. Sur la base de ce qui précède, on ne peut pas considérer que le commandement de payer suisse constitue une simple mesure d'exécution au sens de la convention. Il s'agit au contraire d'un titre exécutoire qui peut en principe participer à la libre circulation des titres de la Convention.
25 Le fait que le commandement de payer soit délivré par un office des poursuites et non par un tribunal à proprement parler est également sans importance. Comme on le sait, la notion de tribunal a été étendue aux autorités administratives par l'art. 62 CL. En vertu de la notion fonctionnelle de tribunal, il faut plutôt se baser sur la fonction de l'autorité de poursuite à exercer selon la base juridique. Il est frappant de constater que l'autorité de poursuite n'est pas déclarée compétente par le droit suisse (plus précisément par la LP) pour trancher un litige existant entre les parties. Sur la base de la jurisprudence Solo Kleinmotoren de la CJCE, cela plaide tout d'abord contre une qualification du commandement de payer en tant que décision au sens de l'art. 32 CL. Toutefois, l'injonction de payer non contestée et non titrée devient de par la loi un titre exécutoire. Par conséquent, dans cette constellation, l'autorité de poursuite est habilitée de plein droit à émettre un titre exécutoire. Dans cette constellation, l'autorité de poursuite est donc également habilitée à trancher un point litigieux entre les parties (notamment la force exécutoire de la créance), raison pour laquelle elle doit être considérée comme un tribunal au sens de l'art. 62 CL. Par conséquent, le commandement de payer ne pourrait certes pas être reconnu, mais pourrait faire l'objet d'une déclaration constatant la force exécutoire à l'étranger.
26 Le fait que l'injonction de payer non contestée et non titrée ne soit pas précédée d'une procédure contradictoire n'est pas non plus déterminant. Selon la jurisprudence de la CJCE, seule la possibilité d'une procédure contradictoire avant le moment de la demande de reconnaissance ou de déclaration constatant la force exécutoire est requise. Cette possibilité existe sans autre pour le commandement de payer, le débiteur pouvant soit faire opposition, soit faire constater à tout moment dans une procédure judiciaire que la prétention sur laquelle se fonde le commandement de payer n'existe pas (art. 85a, al. 1, LP). Cette possibilité garantit en outre le droit à une procédure judiciaire au sens de l'art. 6 CEDH.
27 La seule question qui se pose est donc de savoir si le commandement de payer peut également avoir des effets transfrontaliers. Le commandement de payer est en soi limité à la procédure de poursuite engagée et ne permet justement pas d'engager une autre procédure de poursuite. Le commandement de payer non titré et non contesté ne crée donc un titre exécutoire que pour la poursuite en cours (et non en général) et est donc indissociable de celle-ci. Dans l'optique de la libre circulation des jugements, il convient toutefois de privilégier ici, comme nous l'avons déjà mentionné, une perspective internationale selon laquelle le commandement de payer non titré et non contesté n'est rien d'autre qu'un titre exécutoire limité dans le temps. Étant donné que les titres exécutoires limités dans le temps peuvent faire l'objet d'une déclaration constatant la force exécutoire conformément à la convention, de tels commandements de payer peuvent, à mon avis, participer à la libre circulation transfrontalière des titres.
5. Décisions de mainlevée
28 Si une opposition est levée par une décision de mainlevée (provisoire ou définitive) ou par une action en reconnaissance de dette, cette décision remplace le commandement de payer.
29 Dans le cas d'une décision de mainlevée définitive, il s'agit d'une décision d'exequatur qui déclare exécutoire le jugement ou le substitut de jugement sous-jacent dans la procédure de poursuite correspondante et lève l'opposition. En conséquence, cette décision n'est ni reconnaissable ni exécutable en raison de l'interdiction du double exequatur selon la Convention. En revanche, le titre juridique sur lequel se fonde la décision de mainlevée est en principe susceptible de faire l'objet d'une reconnaissance transfrontalière et d'une déclaration constatant la force exécutoire en vertu de la convention.
30 La procédure de mainlevée provisoire a certes également pour objet la question de savoir si l'acte authentique ou la reconnaissance de dette déposée remplit les conditions d'exécution au sens de l'art. 82 LP. Ainsi, le juge de la mainlevée ne se prononce pas sur l'existence de la créance, mais uniquement sur sa force exécutoire. Néanmoins, il s'agit au fond (et contrairement à l'avis du Tribunal fédéral) d'une procédure de reconnaissance (sommaire) qui a lieu dans le cadre de la procédure de poursuite. Ainsi, le défendeur est également libre de faire valoir des objections matérielles contre l'existence de la créance (art. 82 al. 2 LP). En raison du fait que les décisions sommaires peuvent également faire l'objet d'une déclaration d'exequatur transfrontalière selon la CL, la décision de mainlevée provisoire peut en principe être déclarée exécutoire au niveau international, conjointement avec le commandement de payer, conformément à la convention.
31 Dans ce contexte, il convient de mentionner à nouveau la limitation existante à la procédure de poursuite engagée. Ainsi, la décision de mainlevée n'oblige pas, dans son dispositif, à une prestation pécuniaire, mais accorde la mainlevée provisoire dans une poursuite déterminée pour un montant pécuniaire déterminé. Les effets de la décision sont donc à nouveau limités à la poursuite engagée et servent uniquement à lever l'opposition. Toutefois, une perspective internationale est ici aussi préférable, la décision de mainlevée provisoire constituant également (comme le commandement de payer non frappé d'opposition) un titre exécutoire limité dans le temps. La décision de mainlevée provisoire n'est certes pas encore définitive en soi, mais seulement exécutable provisoirement (en fonction de la non-relevée d'une action en déchéance de droit). Selon la Convention, les décisions qui ne sont exécutoires qu'à titre provisoire peuvent également faire l'objet d'une déclaration constatant la force exécutoire internationale. Par conséquent, il convient de partir du principe que la décision est exécutoire au niveau international, afin de garantir une libre circulation des titres aussi large que possible.
6. Le séquestre
32 Le séquestre est une mesure conservatoire de la LP. Il permet de mettre officiellement sous séquestre les biens du débiteur. Comme on le sait, les mesures de protection juridique provisoires peuvent faire l'objet d'une déclaration constatant la force exécutoire transfrontière conformément à la convention. Dans cette mesure, les mesures de protection telles que le sequestro conservativo du droit italien ou la freezing injunction du droit irlandais sont considérées comme des décisions au sens de l'art. 32 CL. Le séquestre suisse selon les art. 271 ss. LP (à la différence par exemple du séquestre de droit allemand selon les § 916 ss. du DZPO) est limité de par son objet à certains biens situés en Suisse qui doivent être mentionnés dans la demande de séquestre (art. 271 al. 1 LP). En conséquence, la plupart des experts rejettent la force exécutoire internationale du séquestre. Une déclaration d'exequatur selon la convention devrait toutefois être prise en considération au moins lorsque des valeurs patrimoniales faisant déjà l'objet d'un séquestre en Suisse sont transférées à l'étranger. Cela ne vaut toutefois que dans la mesure où le débiteur a eu la possibilité de s'opposer à l'autorisation de séquestre avant la déclaration d'exequatur demandée.
D. Transactions judiciaires
33 Les transactions judiciaires ne peuvent en principe pas être reconnues au sens des art. 32 ss. Convention de Lugano. Elles sont réglées séparément à l'art. 58 CL et ne peuvent faire l'objet que d'une déclaration d'exequatur. Cela pose des difficultés en particulier aux États contractants (comme la Suisse) dans lesquels la transaction judiciaire a force de chose jugée. Ainsi, en cas d'interprétation stricte, la transaction selon le CPC ne pourrait pas avoir d'effet juridique dans le cadre de la convention. En outre, le tribunal de reconnaissance ne pourrait pas non plus refuser de reconnaître une décision au motif que son contenu est en contradiction avec une telle transaction judiciaire. Il n'est toutefois pas clair dans quelle mesure le législateur européen avait en tête la transaction judiciaire selon le CPC. Ainsi, l'art. 58 CL semble plutôt s'orienter vers des transactions qui ne passent pas en force de chose jugée et qui ne présentent qu'un contenu exécutoire (comme le droit allemand ou autrichien le connaît).
34 On peut donc se demander si la transaction au sens de l'art. 241 CPC, combinée à une ordonnance de radiation judiciaire (art. 241, al. 3, CPC), peut être considérée comme un acte de reconnaissance au sens des art. 32 ss Lugano. Convention de Lugano peuvent être reconnus. Dans l'affaire Solo Kleinmotoren, la CJCE a considéré que la décision devait être rendue par un organe juridictionnel de l'État contractant qui, en vertu de son mandat, tranche lui-même le litige entre les parties. Selon la CJCE, cette condition n'est pas remplie dans le cas d'une transaction judiciaire, même si elle est conclue devant un tribunal et met fin à un litige. La transaction judiciaire est essentiellement de nature contractuelle, car son contenu est avant tout déterminé par la volonté des parties. En conséquence, la Cour considère comme déterminant le fait que le tribunal statue lui-même sur les points litigieux ou que la volonté des parties conduise en premier lieu au règlement du litige. En faveur d'une reconnaissance, on pourrait faire valoir que la décision judiciaire de classement atteste d'un examen judiciaire du contenu de la transaction. Ainsi, le juge doit examiner le contenu de la transaction, au moins sommairement et de manière rudimentaire, et refuser la radiation si le contenu convenu est manifestement incompatible avec le droit. Certes, la transaction constitue en soi l'acte générateur de l'autorité de la chose jugée. Toutefois, la transaction n'a d'effet que si cet effet est constaté par une décision de classement. En l'absence d'une telle ordonnance de radiation, la partie adverse pourrait également faire valoir, en cas d'invocation de la transaction, qu'en raison de l'absence d'une ordonnance de radiation, il n'y a pas eu, selon le tribunal compétent, de liquidation effective du procès par déclaration des parties. Il est toutefois douteux que cet examen judiciaire (limité) suffise déjà à supprimer la "nature contractuelle" de la transaction judiciaire. Ainsi, malgré le pouvoir d'examen juridique limité du tribunal, le contenu de la transaction judiciaire est essentiellement déterminé par les parties, conformément à l'article 241 du code de procédure civile. En outre, il faut tenir compte de l'article 2, lettre b, du règlement Bruxelles I, nouvellement introduit dans le système parallèle. Celui-ci parle de transaction judiciaire (au lieu de transaction judiciaire) et la définit entre autres comme une transaction qui a été "approuvée" par un tribunal de l'État membre. En fin de compte, la transaction selon l'article 241 du Code de procédure civile est également approuvée par le tribunal "pour la bonne forme" ou la procédure est classée. On peut donc supposer que la transaction judiciaire, même avec une décision de radiation du rôle rendue par le tribunal, ne constitue pas une décision au sens des art. 32 ss Lugano. Convention de Lugano.
35 Il convient toutefois de noter que la limite entre une transaction judiciaire au sens de l'art. 58 CL et une décision au sens de l'art. 32 CL est floue. Dans la mesure où l'activité du juge ne se limite pas exclusivement à l'approbation (ou à l'authentification) de la transaction et que le contenu de la transaction est repris dans le dispositif du jugement, un tel jugement peut constituer une décision au sens de l'art. 32 CL. Ceci du moins lorsque seule la décision, et non la transaction, est dotée de l'autorité de la chose jugée. De même, les jugements rendus à la demande des deux parties (comme par exemple le judgment by consent irlandais) devraient pouvoir être reconnus. Dans ces constellations, les effets susceptibles d'être reconnus ne sont produits que par un acte de souveraineté étatique, raison pour laquelle il ne faut plus partir du principe d'une "nature purement contractuelle".
E. Décisions relatives à l'arbitrage
36 L'arbitrage est exclu du champ d'application matériel de la convention (art. 1, al. 2, let. d, CL). L'exclusion de l'arbitrage est toutefois formulée de manière extrêmement vague et doit donc être interprétée. Il est incontestable que la convention ne lie pas les tribunaux arbitraux, raison pour laquelle les sentences arbitrales ne sont pas couvertes par la CL. Au contraire, de telles sentences doivent en principe être reconnues et exécutées conformément à la Convention de New York ("CNU"). En outre, certaines procédures judiciaires étatiques ayant un lien étroit avec l'arbitrage peuvent également être couvertes par l'exclusion de l'arbitrage. Ainsi, les décisions qui constituent une condition indispensable à la mise en œuvre d'une procédure d'arbitrage concrète ne sont pas couvertes par le champ d'application matériel de la convention. Par conséquent, les décisions judiciaires relatives à la nomination ou à la révocation d'un arbitre, à la détermination du lieu de l'arbitrage ou à la prorogation du délai pour rendre une sentence arbitrale, entre autres, sont couvertes par l'exclusion de l'arbitrage. En outre, la Convention ne s'applique pas aux décisions concernant les litiges relatifs à une sentence arbitrale (comme les actions en annulation d'une sentence arbitrale). En revanche, la Convention s'applique lorsque l'arbitrage fait l'objet d'une simple question préalable. Il est donc regrettable que les décisions sur le fond rendues en violation d'une convention d'arbitrage soient également reconnues en vertu de la Convention. Ceci constitue une violation flagrante de l'art. II, paragraphe 3, de la Convention de New York.
37 De manière générale, la nature juridique de l'objet du litige semble être déterminante pour la Cour afin de déterminer si une décision relève du champ d'application matériel de la Convention. Toutefois, la jurisprudence de la CJCE ne permet pas de déterminer de manière définitive comment la nature juridique de l'objet du litige doit être déterminée. Ainsi, dans l'affaire Van Uden, la CJCE a estimé, en se limitant aux mesures provisoires, que l'appartenance au champ d'application matériel se déterminait en fonction de la nature juridique des droits à garantir. Dans sa jurisprudence West Tankers, la CJCE a ensuite semblé déterminer de manière générale la nature juridique de l'objet du litige en fonction de la nature juridique des droits à garantir. Il convient donc, à mon avis, de partir du principe que la Cour détermine l'appartenance d'une procédure, et donc de sa décision, au champ d'application matériel en fonction de la nature juridique des droits à garantir.
F. Actes authentiques
38 Les actes authentiques ne constituent pas des décisions au sens de la convention. Ils ne peuvent donc pas être reconnus en vertu de la convention, mais uniquement faire l'objet d'une déclaration constatant la force exécutoire en vertu de l'article 57 de la convention de Lugano.
G. Décisions sur les frais
39 Il ressort déjà du libellé de l'art. 32 CL que les décisions fixant les frais d'une procédure sont susceptibles d'être reconnues et exécutées en vertu de la convention. Cela se justifie dans la mesure où la répartition des frais est souvent décidée dans le cadre de la procédure de reconnaissance. Il faut toutefois que la procédure en question soit couverte par le champ d'application matériel de la Convention.
L'auteur remercie Me Natalie Lisik pour sa relecture critique.
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