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Commentaire
Art. 9 CCC (Convention sur la cybercriminalité [Cybercrime Convention])

Un commentaire de Jérémie Müller

Edité par Damian K. Graf

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I. Généralités

1 L’avènement d’Internet a permis les échanges les plus lointains, les plus rapides et les plus efficaces que l’humanité n’ait connus. Elle a néanmoins aussi fourni des outils de communication très performants à des criminels qui, auparavant, étaient souvent isolés. C’est ainsi que des personnes produisant de la pédopornographie ont pu entrer en contact avec des personnes consommant ce type de supports dans le monde entier. L’échange d'idées, de fantasmes et de conseils entre pédophiles a contribué à appuyer, encourager ou faciliter les infractions sexuelles commises à l'encontre d'enfants

.

2 Or, en plus de faciliter l’échange de matériel pédopornographique, le monde virtuel a également permis de garantir un certain anonymat aux auteurs et par voie de conséquence une forme d’impunité. Il n’est dès lors pas surprenant que ce type de délinquance se soit rapidement développé avec la généralisation d’Internet.

3 L’art. 9 CCC répond donc à la préoccupation exprimée par les membres du Conseil de l'Europe lors de leur 2e sommet en 1997, et reflète une évolution internationale en faveur de l'interdiction de la pornographie enfantine, comme le confirment l'adoption récente du Protocole facultatif à la Convention des Nations Unies relative aux droits de l'enfant se rapportant à la vente d'enfants, à la prostitution des enfants et à la pornographie impliquant des enfants, ainsi que la récente initiative de la Commission européenne sur la lutte contre l'exploitation sexuelle des enfants et la pornographie enfantine (COM2000/854)

.

4 Cette disposition vise à renforcer les mesures de protection en faveur des enfants, notamment contre l'exploitation sexuelle, en modernisant le droit pénal de façon à restreindre plus efficacement l'utilisation des systèmes informatiques dans le cadre de la commission d'infractions sexuelles à l'encontre des enfants

.

5 Dans les années suivant l’adoption de la Convention sur la cybercriminalité, la pornographie enfantine et plus largement l’exploitation sexuelle des enfants sont demeurées des problématiques très importantes. Cela a conduit à l’élaboration de la Convention du Conseil de l’Europe sur la protection des enfants contre l’exploitation et les abus sexuels, adoptée à Lanzarote le 25 octobre 2007. L’art. 20 de ce traité s’inspire très largement de l’art. 9 CCC

.

II. Bien juridiquement protégé

6 L’art. 9 CCC protège deux biens juridiques différents. L’art. 9 § 2 let. a CCC protège directement l’intégrité sexuelle des enfants. Quant à l’art. 9 § 2 let. b et c CCC, ils protègent leur intégrité sexuelle de manière indirecte en interdisant tout comportement qui, sans nécessairement causer un préjudice à l' « enfant » représenté dans le matériel en question, pourrait néanmoins encourager ou inciter des enfants à participer à de tels actes. Ces dispositions s'inscrivent ainsi dans le contexte d'une sous-culture préconisant la maltraitance des enfants

.

III. Éléments constitutifs de base

A. Une représentation pédopornographique

1. Les supports de la représentation

7 L’art. 9 CCC – tout comme l’art. 20 de la Convention du Conseil de l’Europe sur la protection des enfants contre l’exploitation et les abus sexuels – vise exclusivement les représentations visuelles de pornographie enfantine. Cela englobe toutes les représentations qui peuvent être perçues par la vue, en particulier les photos, les dessins, les croquis, les peintures, les gravures, les sculptures, les vidéos et les films. Les enregistrements audio, ainsi que les textes ne sont pas concernés.

8 Dans le cadre de la Convention sur la cybercriminalité, la répression se limite aux représentations visuelles sous forme numérique. Le support sur lequel elles sont enregistrées importe peu. Il est ainsi sans importance qu’elles soient enregistrées sur un disque dur, une clé USB, un DVD ou même dans le cloud.

2. Le caractère pornographie

9 La notion de pornographie n’est définie ni dans la Convention sur la cybercriminalité, ni dans le rapport explicatif. Ce dernier indique simplement que cette notion doit être interprétée conformément aux normes de droit interne qui traitent de la classification de la représentation comme obscène, incompatible avec les mœurs publiques ou ayant à un autre titre un effet pervers

.

10 En Suisse, est considéré comme pornographique ce qui vise à provoquer une excitation sexuelle du consommateur alors que la sexualité est à tel point détachée de ses composantes humaines et émotionnelles que la personne en est réduite à un pur objet sexuel dont on peut disposer à volonté. Le comportement sexuel est grossier et mis exagérément au premier plan

. Entre dans la pornographie, la représentation insistante et répétitive d'actes tels que des fellations, cunnilingus et masturbations
. Cette définition ne semble ni licencieuse, ni particulièrement chaste. Elle paraît au contraire équilibrée et peut donc aisément être reprise au niveau international. Les éléments cardinaux de cette définition se retrouvent d’ailleurs aussi dans l’art. 20 de la Convention du Conseil de l’Europe sur la protection des enfants contre l’exploitation et les abus sexuels – largement inspiré de l’art. 9 CCC – qui définit à son paragraphe 2 la pornographie enfantine comme tout matériel représentant de manière visuelle un enfant se livrant à un comportement sexuellement explicite, réel ou simulé, ou toute représentation des organes sexuels d’un enfant à des fins principalement sexuelles. On peut donc s’en tenir à cette définition.

11 Bien que le texte de l’art. 9 CCC ne le mentionne pas expressément, le matériel présentant un intérêt artistique, médical ou scientifique, n’est pas considéré comme pornographique

.

12 Déterminer ce qui est artistique ou ce qui ne l’est pas est compliqué, surtout dans le contexte d’une convention internationale conclue entre des Etats aux cultures très diverses. A notre avis, le caractère artistique doit être évalué de cas en cas. De manière générale, on peut toutefois dire que du matériel doit être qualifié d’artistique lorsque l’artiste présente une chose de manière originale, a vocation à transmette un message et est le fruit d’une véritable recherche. Cela s’oppose à une représentation crue, triviale ou vulgaire de la réalité.

13 Quant au matériel médical ou scientifique, il s’agit de supports nécessaires à la formation ou à la recherche.

3. La notion de mineur

14 Bien que les droits nationaux de certaines Parties à la convention connaissaient un âge de la majorité plus élevé (p. ex. Canada, Etats-Unis d’Amérique, Japon

), les Parties se sont accordées pour retenir que la notion de mineur s’entend en principe de toute personne âgée de moins de 18 ans (art. 9 § 3 CCC). Comme on le verra au chiffre IV ci-dessous, les Parties peuvent toutefois émettre des réserves pour exiger une limite d’âge inférieure. Dans tous les cas, cette limite doit cependant être de 16 ans au moins.

4. La notion de pornographie enfantine

15 L’art. 9 § 2 CCC définit la notion de pornographie enfantine en fournissant une liste de trois types de représentations punissables. Cette liste est exhaustive.

16 En premier lieu, il est question des représentations mettant en scène un mineur se livrant à un comportement sexuellement explicite. L'expression « comportement sexuellement explicite » désigne avant tout les relations sexuelles, y compris génito-génitales, oro-génitales, ano-génitales ou oro-anales

. Pour être punissable au sens de l’art. 9 § 2 let. a CCC, elles doivent impliquer au moins un mineur. Il importe en revanche peu qu’elles n’aient lieu qu’entre mineurs ou avec un ou plusieurs majeurs. Le genre ou l’orientation sexuelle de chacun des participants est également sans importance.

17 L'expression « comportement sexuellement explicite » est cependant plus large que les seules relations sexuelles. Elle comprend aussi la zoophilie commise avec un mineur, la masturbation d’un mineur, les violences sado-masochistes dans un contexte sexuel commises sur un mineur ou l’exhibition lascive des parties génitales ou de la région pubienne d'un mineur

.

18 Dans l’ensemble des hypothèses qui précèdent, il est sans importance que le comportement représenté soit réel ou simulé

. L’auteur ne peut donc pas échapper à la condamnation simplement parce que le comportement sexuellement explicite n’a pas véritablement eu lieu.

19 Le deuxième type de représentations visé par l’art. 9 § 2 CCC concerne les images pornographiques qui montrent une personne qui apparaît comme un mineur se livrant à un comportement sexuellement explicite (art. 9 § 2 let. b CCC). Il s’agit d’images mettant en scène des personnes qui sont soit tout juste majeures, mais qu’on essaie de faire passer pour des personnes encore mineures, soit clairement majeures, mais qui, par leur habillement, leur maquillage ou les accessoires qu’elles portent, donnent l’apparence de personnes mineures.

20 L’art. 9 § 2 let. c CCC mentionne enfin les images réalistes représentant un mineur se livrant à un comportement sexuellement explicite. Cette dernière hypothèse concerne notamment les bandes-dessinées ou mangas, les photomontages, voire les images créées de toute pièce par des ordinateurs, comme peut le faire l’intelligence artificielle.

B. Un comportement punissable

21 L’art. 9 § 1 CCC énumère cinq comportements punissables. Cette liste est exhaustive.

22 Le premier comportement visé est la « production », c’est-à-dire la fabrication, d’une représentation pédopornographique en vue de sa diffusion par voie informatique. Le terme de « production » comprend l’ensemble des actes nécessaires à la réalisation de représentations de pornographie enfantine. On pense évidement avant tout à la fixation d’images sur un porteur d’images. Il s’agit toutefois aussi de la préparation du lieu et du matériel nécessaire à la réalisation des images, de la retouche des images une fois fixée sur un porteur d’image, du montage de photographies ou de films ou même la création d’images de synthèse par ordinateur. En d’autres termes, ce comportement vise toutes les formes de création ou d’édition de supports visuels. Dans tous les cas, ce matériel doit cependant être destiné à la diffusion par voie informatique. La réalisation d’images numériques destinées à sa propre consommation n’est pas punissable au titre de production, mais uniquement en raison de sa possession (art. 9 § 1 let. e CCC).

23 L’art. 9 § 1 let. b CCC réprime ensuite l’offre ou la mise à disposition de pornographie enfantine par le biais d'un système informatique. Le terme « offrir » désigne un comportement commercial par lequel l’auteur informe sa clientèle qu’il dispose d’un ou plusieurs produits et leur propose de les acquérir. Le type de contrat (vente, échange, donation, …) importe peu. La « mise à disposition » est une notion plus large que l’ « offre », car elle ne signifie pas nécessairement que l’auteur fait une quelconque démarche active pour proposer un produit à sa clientèle. Il s’agit en fait de tout acte qui permet ou facilite l’accès à une représentation pédopornographique par voie informatique. Cela inclut notamment la mise en ligne de pornographie enfantine, par exemple en créant des sites web, ainsi que la création ou à la compilation d'hyperliens vers des sites contenant de la pornographie enfantine

.

24 Un autre comportement punissable consiste à diffuser ou à transmettre de la pornographie enfantine par le biais d'un système informatique. Ces deux notions font référence à des envois de données. La « diffusion » est une distribution de matériel pédopornographique à un nombre indéterminé de personnes qui n’en ont pas nécessairement fait la demande. La « transmission » en revanche est un envoi à une ou plusieurs personnes déterminées qui en ont fait la demande. L’envoi de la représentation pédopornographique peut être effectué par n’importe quelle voie informatique, soit notamment par courriel, par messagerie instantanée ou par transfert « peer-to-peer ».

25 L’art. 9 let. d CCC évoque encore « le fait de se procurer ou de procurer à autrui de la pornographie enfantine par le biais d’un système informatique ». Ce comportement consiste à obtenir activement de la pornographie enfantine, par exemple par téléchargement

. Les données doivent donc avoir été transférées vers le système informatique de l’auteur ou par l’auteur vers le système informatique d’un tiers. Il doit y avoir transfert de possession. L’obtention doit se faire par la voie informatique. Une remise en main propre ou un envoi par la poste ne sont donc pas visés par la convention.

26 Enfin, le dernier comportement punissable est la « possession de pornographie enfantine dans un système informatique ou un moyen de stockage de données informatiques » (art. 9 § 1 let. e CCC). La notion classique de possession suppose à la fois une maîtrise physique sur l’objet et une volonté d’exercer cette maîtrise. Dans le monde virtuel, l’exigence objective de la maîtrise physique sur l’objet doit, à notre avis, être assouplie en ce sens qu’il suffit que le possesseur soit en tout temps et librement capable d’accéder à ses données. C’est bien évidemment le cas si les données se trouvent dans un système informatique qui lui appartient, sur un support d’enregistrement de données tel qu’un disque dur externe, une clé USB ou dans la carte mémoire d’un appareil photographique. L’auteur est toutefois aussi en possession des données s’il les enregistre sur un serveur distant auquel il a accès ou s’il les sauvegarde dans le « cloud ».

27 Sans que l’on en comprenne la raison, le fait de consulter de la pédopornographie directement en ligne, sans se l’approprier, n’a pas été mentionné et n’est donc pas punissable. L’absence de mention de ce comportement dans la liste de l’art. 9 § 1 CCC semble particulièrement surprenante. Au regard de la volonté affichée de lutter contre la pornographie enfantine, la répression de la consommation paraît en effet tout aussi importante que la criminalisation de la production de représentations pédopornographiques. Cet oubli a heureusement été corrigé dans la Convention du Conseil de l'Europe sur la protection des enfants contre l'exploitation et les abus sexuels. Son rapport explicatif mentionne d’ailleurs que le comportement mentionné à l’art. 20 al. 1 let. f vise à permettre les poursuites à l'encontre de ceux qui regardent des images d’enfants sur des sites de pornographie enfantine mais qui, en ne les téléchargeant pas, échappent à la répression pénale

.

C. L’illicéité

28 L'auteur doit agir sans droit. Cet élément constitutif permet aux Parties de créer des exceptions à la répression pénale pour les auteurs agissant dans un intérêt digne de protection, similaire aux intérêts artistique, médical ou scientifique.

29 Cette expression permet aussi d’exclure du champ d’application de l’art. 9 CCC les autorités de poursuite pénale qui détiennent, de manière légale, des images de pédopornographie sous forme de séquestres dans les enquêtes qu’elles instruisent et jugent.

30 L’omniprésence des « smartphones », y compris entre les mains de mineurs, a entraîné diverses dérives. Il n’est ainsi pas rare de nos jours que des personnes – en particulier parmi les jeunes générations – s’envoient des photographies de leur parties intimes au cours de la phase de séduction. Cette pratique pose problème lorsque l’expéditeur d’une telle photographie est un mineur, car il produit de la pornographie enfantine en photographiant sa zone génitale, la transfère lors de l’envoi via un système de messagerie instantanée et même la possède s’il en conserve une copie sur son smartphone. Dans cette situation, le mineur est paradoxalement à la fois auteur et victime de l’infraction réprimée par l’art. 9 CCC. Dans le cadre de l’art. 9 § 2 let. a CCC, nous pensons que les Parties pourraient prévoir que le mineur qui prend une photographie à connotation sexuelle de lui-même, la transmet ou la possède n’agit pas sans droit. Le destinataire de l’envoi qui demande à recevoir une telle image en ayant connaissance de l’âge de l’expéditeur agit en revanche clairement sans droit.

31 S'agissant de l’art. 9 § 2 let. b CCC, l'expression « sans droit » pourrait également permettre à une Partie de prévoir, par exemple, qu'une personne n’est pas punissable s'il est établi que l'individu représenté n'est pas « un mineur » au sens de cette disposition

.

D. L’intention

32 L’infraction est intentionnelle. L'intention doit porter sur tous les éléments objectifs de l'infraction. L’auteur doit donc avoir la conscience et la volonté de produire, d'offrir, de mettre à disposition, de diffuser, de transmettre, de se procurer ou de procurer à un tiers ou encore de posséder de la pornographie enfantine.

33 Les Parties peuvent toutefois adopter une norme plus spécifique, auquel cas cette dernière norme s'appliquerait. Ainsi la responsabilité pourrait, par exemple, être imposée s'il y a « connaissance et contrôle » de l'information transmise ou stockée. Il ne suffit, par exemple, pas qu'un fournisseur de services serve d'intermédiaire pour la transmission de cette représentation, par le biais d'un site web ou d'un bavardoir, entre autres moyens, en l'absence de l'intention requise. De plus, un fournisseur de services n'est pas tenu de surveiller le contenu pour éviter la responsabilité pénale

.

IV. Les réserves

34 L'art. 9 § 3 et 4 CCC autorise les Parties à restreindre la punissabilité de trois manières différentes, à savoir par rapport à l’âge des mineurs, aux comportements punissables et aux objets de la représentation.

A. Quant à l’âge des mineurs faisant l’objet de la représentation

35 Dans le processus d’élaboration de la convention, les Parties ont convenu qu’il était important de fixer l’âge de la majorité de manière uniforme. Elles ont ainsi décidé que le terme « mineur » désignait toute personne âgée de moins de 18 ans. Cette limite a été fixée au regard de la définition d’ « enfant » donnée par l’article 1 de la Convention des Nations Unies relative aux droits de l'enfant

. Il faut toutefois souligner ici que cet âge fait référence à l'exploitation d'enfants en tant qu'objets sexuels. Il doit donc être distingué de l'âge requis pour consentir à des relations sexuelles.

36 Etant donné que certains Etats ont fixé une limite d'âge inférieure dans leur législation nationale concernant la pornographie enfantine, la dernière phrase du paragraphe 3 autorise les Parties à définir une limite d'âge différente, laquelle, en tout état de cause, ne doit pas être inférieure à 16 ans

.

37 Le seul Etat à avoir fait usage de cette possibilité est la Suisse

. Elle a fixé la limite à l’âge de 16 ans pour correspondre à la teneur de l’ancien article 197 al. 3 et 3bis CP. Le 16 juin 2010, la Suisse a toutefois signé la Convention du Conseil de l'Europe sur la protection des enfants contre l'exploitation et les abus sexuels. L’art. 20 de cette convention réprime les infractions se rapportant à la pornographie enfantine. La notion d’ « enfant » qui y est mentionnée est définie à l’art. 3 let. a comme toute personne âgée de moins de 18 ans. Aucune réserve ne pouvant être émise par rapport à l’âge limite, l’art. 197 CP a dû être adapté. La nouvelle teneur de cette disposition est entrée en vigueur le 1er juillet 2014. Elle correspond désormais à la définition générale figurant à l’art. 9 § 3 CCC. La réserve émise par la Suisse au moment de la ratification de la convention n’a donc plus lieu d’être.

B. Quant aux comportements punissables

38 La convention autorise aussi les Parties à limiter la poursuite pénale en refusant de poursuivre le fait de se procurer ou de procurer à un tiers des images pédopornographique et/ou le fait d’en posséder.

39 Au moment de ratifier la convention, l’Ukraine, le Japon et le Sri Lanka ont fait usage de cette possibilité pour ne pas poursuivre l’obtention et la possession de pornographie enfantine

. En 2014, le Japon a modifié sa législation et a pénalisé la possession de pornographie enfantine, ainsi que le fait d’en procurer à autrui
. L’obtention pour soi-même n’est toutefois toujours pas punissable.

40 Israël a précisé qu’elle refusait de poursuivre l’obtention de pornographie enfantine

.

41 L’Argentine a indiqué que la possession de pornographie enfantine n’était pas punissable dans son droit national

.

42 D’autres Etats ont émis des réserves concernant la punissabilité de l’obtention ou la possession de pornographie enfantine à certaines conditions particulières.

43 Le Danemark a ainsi déclaré qu’il renonçait à punir la possession d'images pornographiques impliquant des enfants âgés de 15 ans au moins, si le mineur concerné a consenti à cette possession

.

44 Au moment de la ratification de la convention, le Monténégro a précisé que l'obtention et la possession de pornographie enfantine n’étaient pas punissables quand la personne qui apparaît dans ces matériaux a quatorze ans au moins et a donné son consentement

. Depuis lors, cette exception a été supprimée
.

C. Quant aux objets de la représentation

45 La convention autorise enfin les Parties à limiter la poursuite pénale en refusant de considérer comme illicite les images mettant en scène une personne qui apparaît comme un mineur se livrant à un comportement sexuellement explicite et/ou des images réalistes représentant un mineur se livrant à un comportement sexuellement explicite.

46 La Principauté d’Andorre, la Grande-Bretagne, l’Argentine, le Chili, les Etats-Unis d'Amérique, le Japon, le Pérou et le Sri Lanka ont déclaré qu’ils ne poursuivraient pas les représentations mentionnées à l’art. 9 § 2 let. b et c CCC

. Au moment de la ratification de la convention, l’Islande avait émis une réserve dans le même sens. Cette réserve n’est toutefois plus d’actualité car la loi du 25 juin 2012 a introduit un nouvel art. 210a dans le Code pénal islandais qui réprime aussi les représentations visées à l’art. 9 § 2 let. b et c CCC.

47 Le Danemark, la Hongrie, le Monténégro, la Suisse et Israël ont indiqué qu’ils renonçaient à punir les représentations visuelles d'une personne qui apparaît comme un mineur se livrant à un comportement sexuellement explicite (art. 9 § 2 let. b)

. La France a émis une réserve similaire en précisant qu’elle ne poursuivrait pas les images mettant en scène une personne, majeure au moment de la prise de vue, mais apparaît comme un mineur et se livre à un comportement sexuellement explicite
.

V. Comparaison avec le droit suisse

48 Les comportements ainsi que les différentes représentations réprimées par la convention trouvent leur équivalent en droit suisse à l'art. 197 al. 4 et 5 CP

. Le droit suisse est entièrement conforme à l’art. 9 CCC.

Bibliographie

Corboz Bernard, Les infractions en droit suisse, vol. I, 3e éd., Berne 2010

Trechsel Stefan/Crameri Dean, in : Trechsel Stefan/Pieth Mark (éditeurs), Schweizerisches Strafgesetzbuch, Praxiskommentar, 4. éd., Zurich 2021

Isenring Bernhard/Kessler Martin A., in : Niggli Marcel Alexander/Wiprächtiger Hans (éditeurs), Basler Kommentar, Strafrecht II, 4. éd., Bâle 2018

Travaux législatifs

Conseil de l’Europe, Explanatory Report to the Convention on Cybercrime, Budapest 23.11.2001, disponible à https://rm.coe.int/16800cce5b, visité le 21.1.2024 (cité : Rapport explicatif de la Convention sur la cybercriminalité)

Conseil de l’Europe, Explanatory Report to the Council of Europe Convention on the Protection of Children against Sexual Exploitation and Sexual Abuse, Lanzarote 25.10.2007, disponible à https://rm.coe.int/16800d3832, visité le 21.1.2024 (cité : Rapport explicatif de la Convention du Conseil de l'Europe sur la protection des enfants contre l'exploitation et les abus sexuels)

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DOI (Digital Object Identifier)

10.17176/20240217-134030-0

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